Ça passe, en éteignant l'astre Lionel Messi, ou ça casse, et c'est la crise assurée: l'équipe de France doit montrer contre l'Argentine ce qu'elle a dans le ventre, en 8e de finale du Mondial samedi à Kazan (16h00 à Paris).
C'est dans la capitale du Tatarstan que les Français avaient débuté leur Coupe du monde, de manière apathique, et c'est là qu'ils s'engagent dans les matches à élimination directe, les «mata-mata» comme on dit en Amérique du Sud : soit on tue, soit on est tué. Apathie interdite, et frissons garantis entre les vice-champions d'Europe et vice-champions du monde.
L'objectif officiel des Bleus est d'atteindre la demi-finale, mais les joueurs, le peuple français et jusqu'au président de la République ont la «deuxième étoile», après celle de 1998, dans un coin de la tête ou sur le bord des lèvres.
Il faut déjà monter dans le quart, où les Bleus s'étaient arrêtés au Mondial-2014. Le président de la Fédération (FFF) Noël Le Graët a martelé que Didier Deschamps resterait en poste jusqu'en 2020, mais une élimination dès les 8e de finale rognerait forcément l'attache à «DD»...
Griezmann attendu
Son équipe a pour l'instant avancé de guingois. Elle a obtenu les résultats, deux victoires et un nul (Australie 2-1, Pérou 1-0, Danemark 0-0), mais a sacrifié la manière sur l'autel de l'étanchéité - un seul but encaissé, sur penalty, sans être vraiment inquiétée dans l'ensemble. Un jeu atone qui ne fait guère vibrer ses supporters...
Contre l'Argentine, le jeu, ce sera de mettre ses tripes sur le grill argentin, attisé notamment par un Javier Mascherano assaisonné à la grinta. Les Bleus ont-ils du caractère ? «Contre le Pérou, je l'ai vu. Ils nous sont rentrés dedans, on a répondu présent. On a eu une fin de match compliquée, avec pas mal d'attaques, mais tout le monde a défendu. On a eu cet état d'esprit, il faut le garder contre l'Argentine», a souligné Samuel Umtiti.
La défense bleue avait alors été compacte, quitte à faire jouer Kylian Mbappé contre-nature côté droit, avec repli obligatoire, et à aligner Blaise Matuidi en faux ailier gauche. «On est en bloc et on essaie de récupérer le ballon pour pouvoir contrer, parce qu'offensivement on a des joueurs de qualité, qui vont vite et qui sont capables de faire la différence», a expliqué le gardien remplaçant Steve Mandanda.
En pointe, Olivier Giroud apportera son «plaisir dans la douleur» et voudra prouver qu'il peut marquer contre une sélection huppée en phase finale, et ainsi dépasser l'idole Zinédine Zidane au classement des buteurs historiques en équipe de France (ils sont quatrièmes à égalité, avec 31 réalisations).
Mais, dans l'animation offensive, c'est surtout Antoine Griezmann qui est attendu de pied ferme par la France du foot, lui qui n'a été lors du premier tour que l'ombre du meilleur joueur de l'Euro-2016. «J'espère hausser encore mon niveau en huitièmes», avait-il dit après la mascarade moscovite de mardi face aux Danois. Le temps presse...
Messi revanchard
Paul Pogba, auteur au contraire d'un bon tournoi jusqu'à présent, voulait les clefs de l'équipe; à lui désormais de s'en servir, et de montrer comment une «Pioche» écrase une «Puce».
Car cette fois pour les Bleus en 8e de finale, c'est l'Argentine de Messi ; ce n'est ni le Nigeria (2-0 au Mondial-2014) ni l'Irlande (2-1 à l'Euro-2016), mais une nation majeure du foot, titrée deux fois en Coupe du monde (1978, 1986) et finaliste de la dernière édition.
Certes, l'Albiceleste s'est qualifiée sur le fil, aussi bien pour aller en Russie que pour s'extraire de son groupe au premier tour; certes, elle présente des carences défensives, exploitées par Islandais (1-1), Croates (0-3) et Nigérians (2-1); certes, son sélectionneur Jorge Sampaoli s'est fait déposer par la «république des joueurs».
Mais le président en est rien moins que Messi, mythe vivant, avec des ministres tels que Sergio Agüero, Angel Di Maria, Gonzalo Higuain ou Ever Banega. Et le buteur hors norme, après quatre finales perdues (trois Copas America, un Mondial), vit peut-être à 31 ans sa dernière chance de glaner un titre international et d'éloigner l'encombrant Diego Maradona, qui mène toujours le jeu dans la mémoire collective comme dans les tribunes russes.