Face à une pollution de l’air toujours plus importante dans le pays, le gouvernement pakistanais a eu recours à l’ensemencement des nuages dans la mégapole de Lahore ce samedi 16 décembre. Cette technique visant à créer artificiellement de la pluie est critiquée par la communauté scientifique.
Évoquée comme une vraie solution de lutte contre la polution par l'Inde il y a quelques semaines, le Pakistan l'a déjà adoptée. Une pluie artificielle est tombée pour la première fois hier, samedi 16 décembre, dans la mégapole de Lahore, a annoncé le gouvernement local.
Alors que cette région pakistanaise connaît des pics de pollution impressionants depuis plusieurs années, la pluie artificielle était la solution d'urgence. Comment le gouvernement local a-t-il pu générer une pluie de cette nature ?
Des avions, fournis par les Emirats arabes unis et équipés de la technologie d'ensemencement des nuages, ont survolé dix zones de la ville. L’objectif était simple simple : chasser le brouillard toxique qui entoure la région pakistanaise grâce à davantage de précipitations dans la ville. Cette technique a été mise en oeuvre dans des dizaines de pays, dont les Etats-Unis, la Chine et l'Inde.
«L’ensemencement des nuages consiste à modifier la structure d’un nuage de façon à accroître les possibilités de précipitation. Il s’agit plus précisément de relâcher de minuscules particules semblables à des cristaux de glace dans les nuages. Habituellement, ce sont des particules d’iodure d’argent qui sont utilisées à cette fin», a expliqué l’organisme caritatif canadien Parlons sciences.
«Ces particules servent alors de noyaux de condensation additionnels. Les molécules de vapeur d’eau surfondue libres se condensent autour d’elles. Puis, ce sont les gouttelettes de vapeur d’eau condensée qui s’agglomèrent, et ce processus se poursuit jusqu’à ce qu’elles forment des gouttes suffisamment grosses pour tomber sous forme de pluie», a conclu ce dernier.
«Même une pluie très modeste est efficace pour réduire la pollution», a assuré Sachchida Nand Tripathi, le professeur d'ingénierie énergétique durable à l'origine du projet, en Inde. Il a ajouté que cette technique «n'a montré aucun effet négatif partout où elle a été essayée».
des scientifiques dubitatifs
Cette technique est loin de faire l’unanimité au sein de la communauté scientifique. Ces détracteurs mettent en avant un problème dissimulé mais qui n’est pas éradiqué, juste repoussé temporairement.
L’experte environnementale Bhavreen Kandhari a évoqué pour l’AFP une «approche inefficace» face à la pollution. «On risque de dépenser inutilement des fonds publics et de perdre un temps précieux», a affirmé cette dernière.
Un constat partagé par Sunil Dahiya, une analyste du Centre pour la recherche sur l'énergie et la pureté de l'air (CREA), qui a estimé que la pluie artificielle n'est pas une «solution définitive» à la pollution.
«Le répit est éphémère, car dès que les pluies s'arrêtent, des masses d'air polluées arrivent, ramenant rapidement la qualité de l'air à des niveaux dangereux». Les émissions doivent être réduites à la source «pour des améliorations durables et significatives de la qualité de l'air», a conclu l’experte.
La pollution de lahore est très préoccupante
La pollution de l'air s'est aggravée ces dernières années au Pakistan, les émanations de diesel bas de gamme, les fumées provenant des brulis agricoles saisonniers et le refroidissement hivernal des températures favorisent ce fameux smog, qui asphyxie les poumons des 11 millions d'habitants de Lahore.
Les niveaux de polluants PM2.5, des microparticules cancérigènes qui pénètrent dans la circulation du sang par les poumons, ont dépassé ce samedi à Lahore plus de 66 fois le seuil considéré comme dangereux par l'Organisation mondiale de la Santé (OMS).
Les conséquences d'une exposition prolongée au smog, ce mélange de brouillard et d'émissions polluantes, est catastrophique : maladies cardiaques, cancer du poumon, maladies respiratoires, attaques cérébrales, selon l'OMS.
Les gouvernements successifs ont tenté différentes approches, dont l'aspersion des routes avec de l'eau ou la fermeture des écoles, des usines et des marchés les week-end, avec plus ou moins de succès.