Un Néerlandais paralysé des jambes depuis douze ans a pu marcher à nouveau, grâce à deux technologies rétablissant la communication entre le cerveau et la moelle épinière.
Cette avancée scientifique va donner de l'espoir à toutes les personnes concernées. Gert-Jan, un Néerlandais paralysé des jambes depuis douze ans, a réussi à marcher à nouveau. Une prouesse rendue possible par l'association de deux technologies implantées dans le cerveau et la moelle épinière. Ce résultat est le fruit de plus de dix ans de recherches menées par des équipes en France et en Suisse.
CHANGER UNE VIE
«J'ai retrouvé ma liberté», affirme Gert-Jan. Atteint d'une lésion de la moelle épinière au niveau des vertèbres cervicales à la suite d'un accident de vélo il y a une dizaine d'années, ce Néerlandais de 40 ans peut désormais se tenir debout, se déplacer sur des terrains variés et même monter un escalier grâce à la médecine.
«Au départ, il était incapable de faire un pas», a rapporté à l'AFP la chirurgienne suisse Jocelyne Bloch, professeure au centre hospitalier universitaire vaudois, lors de la présentation d'une étude publiée mercredi dans la revue Nature.
UN DISPOSITIF ÉLECTRIQUE
Ce sont 64 électrodes développées par le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) qui ont été implantées chez le patient paralysé, au-dessus de la région du cerveau responsable des mouvements des jambes. Ces électrodes permettent de décoder les signaux électriques générés par le cerveau lorsque nous pensons à marcher. Parallèlement, un neurostimulateur connecté à seize électrodes a été positionné sur la région de la moelle épinière contrôlant le mouvement des jambes. Grâce à des algorithmes basés sur des méthodes d'intelligence artificielle adaptatives, les intentions de mouvement sont décodées en temps réel.
Une première !
Un homme paralysé peut marcher à nouveau après être devenu le premier "pilote d'essai" d'un système d'intelligence artificielle novateur qui lit ses pensées et relie sans fil son cerveau et ses jambes. pic.twitter.com/QCMGxfUOsX— Jonathan Chan (@ChanPerco) May 25, 2023
Les données sont transmises via un système portatif placé sur un déambulateur ou dans un petit sac à dos, permettant au patient de se passer d'aide extérieure. Jusqu'à présent, l'installation d'un seul implant stimulant électroniquement la moelle épinière avait permis à des patients paraplégiques de remarcher. Mais le contrôle de cette marche n'était pas naturel.
Cette fois, le pont numérique créé entre le cerveau et la moelle épinière permet non seulement à Gert-Jan de se déplacer, mais aussi de contrôler volontairement ses mouvements et leur amplitude.
«un long périple» pour parvenir à se tenir debout
«Les patients précédents marchaient en faisant beaucoup d'efforts. Là, il a juste besoin de penser à marcher pour faire un pas», s'enthousiasme le neuroscientifique français Grégoire Courtine, professeur en neuroscience à l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne.
Pour parvenir à cette facilité, Gert-Jan a dû subir deux interventions chirurgicales pour la pose des deux implants. En s'entraînant assidûment à marcher, le patient a progressivement récupéré les fonctions neurologiques qu'il avait perdues depuis son accident. Le patient évoque «un long périple» pour parvenir à se tenir debout de nouveau et marcher pendant plusieurs minutes d'affilée.
Ce n'est qu'après six mois d'entraînement qu'il semble avoir récupéré une partie de ses facultés sensorielles et motrices, même lorsque le système est désactivé. «Ces résultats suggèrent que l'établissement d'un lien entre le cerveau et la moelle épinière favorise une réorganisation des circuits neuronaux au niveau de la lésion», décrypte Guillaume Charvet, du CEA.
Malheureusement, ce dispositif ne sera pas accessible à tous. «Il faudra encore de nombreuses années de recherche» avant sa généralisation, selon M. Charvet. Cependant, les équipes s'apprêtent déjà à lancer un essai pour restaurer, avec la même technologie, la fonction des bras et des mains. Elles espèrent également l'appliquer à d'autres indications cliniques, telles que la paralysie provoquée par un accident vasculaire cérébral.