Plus de 10.000 femmes auraient pris de la Dépakine, un anti-épileptique accusé de provoquer des malformations chez le foetus, entre 2007 et 2014, affirme une étude. Une information qui aurait été cachée aux familles concernées par le ministère de la Santé.
Le Canard Enchaîné, qui révèle les résultats de cette enquête «alarmante» menée conjointement par l'agence du médicament ANSM et la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAMTS), affirme ainsi que la première partie de l'étude aurait été communiquée au ministère de la Santé dès la mi-juillet mais «soigneusement cachée aux familles».
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Le ministère a démenti, précisant que «le premier volet» de l'étude sera présenté à l'Association d'aide aux parents d'enfants souffrant du syndrome de l'anticonvulsivant (Apesac) le 24 août prochain. «Cette réunion a été fixée dès la fin du mois de juillet. Le ministère étudiera, en lien avec cette association représentative des familles avec laquelle il travaille étroitement, les mesures qu'il apparaîtra nécessaire de mettre en oeuvre», précise le ministère qui ajoute que l'étude et «le plan d'action qui sera établi sur cette base» seront pour leur part rendus publics début septembre.
Des cas d'autisme pouvant atteindre jusqu'à 40% des enfants exposés
Présent dans plusieurs spécialités pharmaceutiques dont la Dépakine, le valproate de sodium est sur la sellette depuis plusieurs années à cause de son risque élevé de malformations - de l'ordre de 10% - mais également d'un risque plus élevé de retards intellectuels et/ou de la marche, ainsi que de cas d'autisme, qui peuvent atteindre jusqu'à 40% des enfants exposés. Utilisée pour traiter l'épilepsie, la Dépakine est commercialisée en France par Sanofi depuis 1967, puis sous forme générique par d'autres laboratoires. Mais le valproate est également prescrit dans les troubles bipolaires, sous d'autres appellations (Dépakote, Dépamide).
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L'Apesac avait donné l'alerte dès 2014, accusant Sanofi et les autorités sanitaires d'avoir tardé à agir alors que les risques du valproate de sodium sont connus depuis longtemps. Elle évalue à près de 30.000 le nombre des victimes du médicament depuis 1967. En février dernier, l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) avait pour sa part évalué à 450 le nombre d'enfants nés avec des malformations congénitales entre 2006 et 2014 après avoir été exposés in utero au valproate. Suite au rapport de l'Igas, la ministre de la Santé Marisol Touraine a annoncé la création d'une filière pour prendre en charge les enfants victimes. Elle a également reçu la présidente de l'Apesac pour faire avancer le dossier des indemnisations.
Des chiffres qui ne surprennent pas
Réagissant aux révélations du Canard Enchaîné, Me Charles Joseph-Oudin, principal avocat des victimes, a indiqué que les chiffres ne le surprenaient pas. Ce dernier a en revanche démenti que le ministère de la Santé ait voulu cacher l'étude aux familles. «Le ministère ne nous a rien caché» a-t-il dit, précisant que le rendez-vous du 24 août était fixé depuis la fin juillet. Il a par ailleurs insisté sur la nécessité de parvenir à des avancées rapides dans la prise et charge et l'indemnisation des victimes et émis le souhait qu'une loi puisse être votée «avant la fin de l'année» sur un mécanisme d'indemnisation du type de celui mis en place pour le Mediator.