L'abandon de l'écotaxe en 2014 constitue un «échec de politique publique» qui a coûté à l'Etat près d'un milliard d'euros en indemnisations, tandis que la solution de remplacement adoptée pénalise poids lourds français et automobilistes, selon la Cour des Comptes.
«L'abandon de l'écotaxe poids lourds constitue un échec de politique publique, dont les conséquences sont probablement très durables», déplore la Cour des Comptes dans son rapport annuel publié mercredi. L'Etat se retrouve en effet avec, notamment, une ardoise de 957,58 millions d'euros d'indemnités à verser à la compagnie Ecomouv' (Autostrade per l'Italia) - chargée de la mise en oeuvre de cette taxe - et ses partenaires.
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Les sages de la rue Cambon déplorent un pilotage du projet «centré sur des objectifs de court terme», une suspension «prise dans la précipitation pour tenter de répondre à une situation d'urgence». Pour eux, cette «décision sans base contractuelle a fragilisé la position de l'État, limitant notamment toute possibilité de rechercher, par la suite, une éventuelle faute d'Écomouv' (société chargée de la mise en oeuvre de cette taxe, ndlr) dans le retard ou les défauts du dispositif». L'Etat se retrouve au final avec une lourde ardoise: 957,58 millions d'euros d'indemnités à verser à la compagnie Ecomouv' et ses partenaires, et 70 millions d'euros pour mettre en oeuvre l'écotaxe, puis la défaire. A ces dépenses s'ajoutent des recettes manquantes : 9,8 milliards d'euros d'écotaxe entre 2014 et 2024, et 795 millions d'euros de taxe à l'essieu pour la période 2009-2024 - cette taxe avait été abaissée en prévision de l'arrivée de l'écotaxe.
Une solution de remplacement pénalisante
Et au final, la solution de remplacement adoptée, une hausse de la taxe sur les carburants (TICPE) pénalise poids lourds français et automobilistes «au bénéfice des poids lourds étrangers qui se ravitaillent peu en France», et «l'objectif indirect de rééquilibrage de la compétitivité relative entre les transporteurs français et étrangers en France, que portait l'écotaxe poids lourds, est mis en échec».
Dans sa réponse à la Cour des comptes, le cabinet du Premier ministre affirme que cette décision a fait l'objet d'«analyses juridiques et financières», et que l'Etat a utilisé «tous les leviers dont il disposait dans le cadre des négociations avec Écomouv'», obtenant ainsi «des conditions financières plus favorables qu'initialement prévues».