Jean-Christophe Lagarde est la nouvelle figure du centre. Le président de l’Union des démocrates et indépendants (UDI) a été élu jeudi dernier avec 53,49 % des voix face à l’ancien ministre de la Défense Hervé Morin. A 47 ans, le député-maire de Drancy (Seine-Saint-Denis) succède ainsi à Jean-Louis Borloo et ne cache pas son ambition de voir son parti "gouverner la France".
La campagne s’est achevée jeudi dernier. Comment l’avez-vous vécue?
C’est un moment passionnant de rencontres et d’échanges avec nos militants. Mais c’est un moment difficile, car une campagne interne se fait entre amis. La campagne est désormais terminée. Nous sommes maintenant à l’heure de la construction de cette UDI qui, deux ans après sa naissance, s’est donnée l’ambition de gouverner la France.
Comment y parvenir?
Le centre est la seule force politique républicaine à ne pas avoir gouverné la France depuis trente-trois ans (fin du septennat de Valérie Giscard d'Estaing, ndlr). L’UDI peut apporter du neuf pour 2017, des équipes nouvelles. Nous nous sommes donné un rendez-vous début 2016. Durant ce congrès, tous les militants choisiront à la fois le candidat et la stratégie qui sera la nôtre.
Vous travaillez actuellement à la construction de votre équipe. Hervé Morin y aura-t-il sa place ?
Nous nous sommes rencontrés depuis et il fera naturellement partie de l’équipe nationale, comme d’autres qui l’ont soutenu. Je veux une UDI rassemblée, qui permette non pas de poursuivre un enjeu interne que l’élection a tranché, mais qui soit capable d’expliquer aux Français que notre pays n’est pas sans espoir, qu’il y a des solutions pour s’en sortir. Nous ne sommes pas condamnés à choisir entre ceux qui ont déjà échoués et les démagogues, populistes et extrémistes.
L’ancien président du parti Jean-Louis Borloo vous a félicité. Allez-vous rester en contact ?
Jean-Louis Borloo ne fait plus de politique, mais cela ne veut pas dire qu’il n’a pas un regard amical et attentif sur la famille qu’il a contribué à rassembler. Naturellement, j’aurai des conversations avec lui. Il a une expérience qui peut être utile, mais il ne souhaite plus se mêler de la vie de notre parti.
Vous avez dit votre volonté de ne plus être «porteurs de valise»… Qu’entendez-vous par là ?
Que dans la Ve République, il y a un système électoral dans lequel des alliances sont nécessaires. Nous avons une alliance naturelle avec la droite républicaine. Mais dans une alliance, il y a de la concurrence. Notre ambition est de conduire une coalition, mais de ne pas être dans la soumission.
La loi sur le mariage pour tous est revenue sur le devant de la scène ce week-end. Quelle est votre position sur cette question ?
Je ne crois ni raisonnable, ni possible de revenir sur la loi Taubira. Dans le code civil, il doit y avoir égalité des droits qu’il s’agisse du mariage ou de l’adoption. En revanche nous combattrons l’idée de la PMA ou de la GPA pour les couples homosexuels.
Que pensez-vous de la politique menée par François Hollande?
Comme tous les Français... On voit bien qu’il y a chez le président de la République une incapacité absolue à fixer un cap, à tenir une ligne et à l’expliquer. On change de décisions tous les quatre matins. Sous Nicolas Sarkozy, on avait l’impression que le pays était dirigé à dix semaines. Sous François Hollande, c’est à dix heures. Pour s’en sortir, la France a besoin d’être gouvernée à dix ans, avec un vrai horizon.
L’Europe est un thème important au sein de l’UDI. Que proposez-vous concrètement ?
Lors de notre congrès, samedi dernier, nous avons affirmé pour la première fois que nous étions le premier parti fédéraliste européen. Nous voulons un gouvernement économique de la zone euro pour reconquérir les souverainetés qui nous ont échappées. Seul, nous n’y arriverons pas. C’est l’unique moyen de ne pas subir la mondialisation, mais d’en tirer profit. Contrairement à ce que veulent faire croire le tandem Mélenchon-Le Pen, ce n’est pas en repliant la France sur elle-même qu’elle pourra s’en sortir.
Quels seront les autres grands chantiers sur lesquels va se pencher l’UDI ?
Reconstruire l’école de la République, cet instrument offert à tous afin qu’ils puissent construire leur vie en fonction de leur mérite, de leurs talents et non de leur naissance ou de leur héritage. Or, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Ce n’est certainement pas les réformes engagées par le gouvernement de François Hollande, comme la réorganisation du temps scolaire, qui permettront à nos enfants d’apprendre à lire, à compter, à trouver une formation, une place dans la société. Il faut changer nos méthodes et nos objectifs.
Il y a un second pilier de la république qui est fracturé, c’est notre système fiscal. Il est inefficace et inéquitable. Il faut tout changer.
Quels sont les sujets sociétaux sur lesquels vous souhaiteriez vous pencher ?
La fin de vie est un vrai sujet qu’il conviendra de traiter et d’améliorer, mais sans esprit partisan. On est là sur des questions qui touchent à l’intime, à des convictions et au vécu, aux expériences, aux souffrances. Je n’ai pas d’avis tranché, je suis en réflexion mais je considère que la situation actuelle n’est pas satisfaisante. Ce sont des questions extrêmement complexes.
Concernant la campagne au sein de l’UMP, quel serait selon vous le candidat le mieux placé pour prendre la tête du parti ?
Pendant la campagne à l’UDI, j’ai expliqué que l’UMP n’avait pas à se mêler de l’organisation du centre que nous sommes en train de construire. Je n’ai donc pas à me mêler de la campagne de l’UMP. Ce seront nos partenaires, nos alliés et en même temps nos concurrents.
Si vous étiez dans la peau du président de la République, que feriez-vous ?
Je démissionnerais. Car je pense que François Hollande n’a plus de prise sur le réel et sur la vie des Français. Ils l’entendent mais ne l’écoutent plus. Or, la France a besoin de savoir où elle va dans les dix prochaines années. Et je pense que le président actuel n’en a plus les moyens, ni la crédibilité.