Le Sénat s'apprête à rejeter mercredi le budget 2014, après avoir taillé dans les recettes prévues par le gouvernement, c'est-à-dire les impôts et taxes, comme il l'avait fait avec le budget de la Sécurité sociale.
Depuis le 21 novembre, jour où le débat budgétaire a débuté, les sénateurs, à l'initiative des groupes UMP et centriste, ont supprimé plusieurs dispositions phares du texte et en ont rajouté d'autres, au point de l'avoir rendu inacceptable pour le gouvernement.
"Hors de question pour nous de voter ce texte ainsi", a confié mardi à l'AFP un responsable PS, en évoquant la possibilité pour le gouvernement de demander un vote bloqué, c'est-à-dire sans les amendements adoptés par les sénateurs. Le gouvernement avait déjà eu recours à cette procédure pour le budget de la Sécu.
Et si le volet recettes est rejeté, cela interrompt automatiquement l'examen de tout le texte budgétaire qui comprend aussi les dépenses.
"Vous parlez beaucoup de réduire les déficits, mais vous proposez systématiquement des baisses de recettes sans économies pour les compenser, sinon le gel des pensions et la baisse du nombre de fonctionnaires dans des proportions invraisemblables", a accusé le ministre Benoît Hamon au cours du débat à l'adresse de l'opposition.
"Le Sénat est une assemblée politique ", lui a répondu le président de la commission des finances Philippe Marini (UMP). "Souffrez qu'il émette des votes politiques pour exprimer son désaccord avec votre politique fiscale".
"M. Marini, ne vous prévalez pas d'une majorité pour soutenir vos propositions, elle n'existe pas!", a répliqué alors Jean-Pierre Caffet (PS). "Je constate que vous prévoyez 5 milliards de dépenses en moins, mais aussi 13 à 14 milliards de recettes en moins".
La taxe à 75% à la trappe
Les sénateurs avaient d'emblée rejeté la baisse du quotient familial, les communistes du groupe CRC comme la droite y voyant une attaque contre les familles.
Ils ont ensuite voté contre la suppression de l'exonération fiscale de la participation de l'employeur aux contrats collectifs de complémentaire santé, et contre la suppression de l'exonération d'impôt sur le revenu des majorations de retraite ou de pension pour charge de famille.
Autre mesure emblématique du PLF, la création de la taxe exceptionnelle à 75% sur les hautes rémunérations, qui a provoqué une polémique dans le monde du football , est passée à la trappe sénatoriale.
En revanche les sénateurs ont adopté un amendement défendu par les écologistes, la droite et les communistes pour appliquer le taux réduit de TVA aux transports publics urbains, alors qu'ils doivent subir la hausse du taux intermédiaire de 7 à 10%.
Contre l'avis du gouvernement et de la commission des finances, ils ont aussi voté un article additionnel rétablissant l'exonération fiscale pour les heures supplémentaires, et le maintien du taux réduit de la TVA à 5,5%, au lieu de 5% proposé par le PLF.
Un amendement commun de Chantal Jouanno (UDI-UC) et de Jean-Vincent-Placé (EELV) maintenant le taux réduit de TVA pour les centres équestres alors qu'il devrait passer de 7 à 20% en raison des injonctions de Bruxelles a été également voté, contre l'avis du gouvernement qui a promis de se battre en faveur de la filière.
Le gouvernement doit compter sur chaque voix de gauche -PS, écologiste, RDSE (à majorité PRG) et CRC- pour faire passer ses textes au Sénat. Or il lui manquera les voix communistes et écologistes sur le budget.
"Soit ce budget change profondément et toutes les forces de gauche convergeront pour le soutenir, soit ce n'est pas le cas et nous voterons contre", avait prévenu pour le groupe CRC Thierry Foucaud, en entamant la discussion générale.
"Sans avancées significatives dans la discussion des amendements, le groupe écologiste ne sera pas en mesure d'approuver le volet recettes de ce projet de loi", avait annoncé Jean-Vincent Placé, sous-entendant l'abstention de son groupe.