Le ministre de l'Intérieur Manuel Valls a sollicité l'arbitrage de François Hollande sur le projet de loi pénale de sa collègue de la Justice Christiane Taubira, en soulignant les nombreux "désaccords" sur le texte, indique mardi le quotidien Le Monde.
"J'attire votre attention sur les désaccords mis en lumière par le travail interministériel (...) autour du projet de réforme pénale présenté par le ministère de la justice", a écrit le ministre dans une note adressée fin juillet à la présidence, révélée par Le Monde et dont l'AFP a eu confirmation de source proche du dossier.
"Tant pour des raisons de méthode que de fond, l'écart entre nos analyses demeure trop important et appelle une clarification de nos orientations politiques", écrit le ministre, qui souhaite "que nous définissions collectivement les principes directeurs de cette réforme autant que les modalités de son déploiement".
Le texte de la Chancellerie, très attendu mais qui a pris pas mal de retard, vise notamment à limiter le recours à la prison, entre autres par l'introduction d'une "peine de probation". M. Valls critique notamment l'automaticité de certaines réductions ou aménagements de peine, juge que le texte "repose sur un socle de légitimité fragile" et déplore "le bref délai dans lequel est conduite la réflexion sur un projet de loi, techniquement dense et politiquement sensible", soulignant qu'il n'a été transmis à son cabinet que le 12 juillet.
Interrogé par l'AFP, l'entourage du ministre a indiqué que ce "courrier", adressé au président de la République et au Premier ministre notamment, n'avait pas "vocation à être publié et que le ministre "regrette" qu'il l'ait été. "Il y a un projet de loi gouvernemental et des travaux préparatoires". "Il n'y a donc rien d'étonnant à ce que l'Intérieur exprime et ait sa ligne dans ce cadre", car " il s'agit d'un travail en amont, avec des discussions, un débat interne", toujours selon l'entourage du ministre.
Selon Le Monde, Mme Taubira s'est de son côté dite "surprise" que son collègue ne l'ait pas informée de cette missive.
Interrogés par l'AFP, la Chancellerie et l'Elysée n'ont fait dans l'immédiat aucun commentaire.
Mais selon des éléments de réponse à la missive de son collègue publiés par Le Monde, la garde des Sceaux estime que "nous sommes au point au-delà duquel on peut aller sans dénaturer la réforme, sauf à se priver des outils nécessaires pour lutter contre la récidive et renoncer à une réforme de rupture, telle qu'attendue et telle qu'annoncée pendant la campagne présidentielle."