Ex-notable du Parti socialiste devenu héraut des sans-grade à la tête du Front de gauche, Jean-Luc Mélenchon, 60 ans, candidat pour la première fois à l'élection présidentielle, est un tribun hors pair, passé maître dans l'art de galvaniser les foules.
L'ambition de l'eurodéputé (Parti de gauche) qui s'ennuie au Parlement européen, est claire: "un jour ou l'autre, c'est nous qui allons réorganiser la gauche autour de nous".
Le PS est "un astre mort qui ne fait que continuer sur sa lancée", affirmait récemment à l'AFP celui qui a claqué la porte du parti en novembre 2008, dénonçant son orientation vers "le centre-gauche" après la victoire de la motion de Ségolène Royal en vue du congrès de Reims.
Son credo: "Barrer la route au libéralisme".
D'origine espagnole, né à Tanger (Maroc) en août 1951, le fondateur du Parti de gauche a vécu un traumatisme fondateur en arrivant en Normandie en 1962: "J'ai compris que tout peut s'arrêter du jour au lendemain".
Pris dans le bouillonnement du marxisme post-68 à la faculté de Besançon, le militant de l'OCI trotskyste tombe sous la fascination du verbe de François Mitterrand à la faveur d'un meeting, qu'il devait pourtant perturber.
Après une brève expérience dans l'enseignement, l'eurodéputé commence dans l'Essonne un parcours d'apparatchik du PS. En 1986, tout juste élu, le plus jeune sénateur de France se fait l'écho de la colère étudiante contre la loi Devaquet dans l'enceinte feutrée de l'hémicycle, au coeur du Quartier Latin.
Un pied dans les institutions, un autre à la gauche du PS, Jean-Luc Mélenchon anime avec Julien Dray la Gauche socialiste. Il a confirmé récemment un engagement plus secret chez les francs-maçons ("Mélenchon, le Plébéien", Lilian Alemagna et Stéphane Aliés).
Ministre de l'Enseignement professionnel de Lionel Jospin, le pied-noir subit un choc au lendemain du 21 avril 2002 qui le plonge dans une profonde déprime.
Il rebondira pendant la campagne du "non" au traité constitutionnel en 2005, qu'il mène avec Laurent Fabius.
C'est l'époque où le philosophe de formation teste des slogans tels "qu'ils s'en aillent tous" ("que se vayan todos") qui deviendra le titre de son livre, rapportés de ses voyages en Amérique latine (Argentine, Bolivie, Vénézuela...), sources d'inspiration pour le théoricien français de l'"insurrection citoyenne" à laquelle il a appelé lors d'une manifestation monstre à la Bastille.
Isolé, à couteaux tirés avec le Premier secrétaire de l'époque, un certain François Hollande, Jean-Luc Mélenchon quitte le PS juste avant le congrès de Reims en 2008, s'en allant fonder le Parti de gauche avec une poignée de soutiens.
S'imposant au PCF moyennant un accord (à moi la candidature, à vous les communistes l'essentiel des circonscriptions aux élections législatives), le candidat FG s'est très tôt positionné en rival numéro un de Marine Le Pen, avec en ligne de mire la reconquête du vote ouvrier.
Cet homme brun de taille moyenne s'est imposé dans la campagne par son style, son verbe haut, ses saillies brutales. "Un nouveau Marchais", disent certains. En tous cas, il fait le show en meetings et ses salles sont toujours pleines. Veste noire, chemise blanche et cravate rouge, ce lettré sait se faire pédagogue devant son auditoire qui l'écoute en silence, pour dès l'instant d'après rire à gorge déployée de ses bons mots.
Dans son bureau, Jean-Luc Mélenchon conserve une photo du "Vieux", François Mitterrand, le dernier non communiste à avoir représenté le PCF à une présidentielle. C'était en 1974, 38 ans avant lui. "Moment émouvant" d'une "nouvelle page d'histoire à gauche", confie-t-il.