Les scénarios hollywoodiens les mieux ficelés n'auraient pas osé y songer. Pourtant, c'est désormais un fait : Kanye West, le sulfureux rappeur américain aux millions d'albums vendus et Donald Trump, l'un des présidents les plus controversés de ces dernières décennies, se vouent une admiration mutuelle. Pire, ils n'essaient même pas de s'en cacher.
La scène paraît a priori anodine. Donald Trump, gaillardement assis dans son confortable «trône» du Bureau ovale, est entouré d'une horde de photographes, affichant le sourire satisfait dont lui seul a le secret. Pourtant, le président américain ne reçoit pas un invité comme les autres. En face de lui se trouve Kanye West, l'un des rappeurs les plus puissants des Etats-Unis et l'un des plus gros vendeurs de disques de hip-hop de sa génération. Et les deux protagonistes ont apparemment beaucoup de points communs.
«Cette casquette me donne la sensation d'être comme Superman»
Ce jeudi 11 octobre, Kanye West avait des choses à dire. Si la rencontre avait initialement été programmée pour discuter des réformes carcérales, le rappeur a finalement préféré concentrer le débat sur son sujet favori : lui-même. Casquette «Make America Great Again» vissée sur la tête et embrassades chaleureuses à n'en plus finir, l'artiste s'est lancé dans un monologue interminable, tapant du poing sur la table à plusieurs reprises : «Mes propres amis ont tenté de me dissuader de porter cette casquette mais elle me donne du pouvoir. Mes parents se sont séparés donc je n'avais pas beaucoup d'énergie masculine chez moi. Et dans ma belle-famille, il n'y a pas beaucoup d'énergie masculine (...) Cette casquette me donne la sensation d'être comme Superman, c'est mon héros préféré et vous avez crée une cape de Superman», a-t-il expliqué, devant un Donald Trump visiblement fasciné.
Une rencontre du troisième type qui a affolé les médias américains, traumatisés par cette amitié improbable.
«Les gens pensent que parce que vous êtes noir, vous devez être démocrate»
Mais les deux provocateurs n'en sont pas à leur premier coup d'essai. En 2016, quelques semaines après l'élection officielle de Donald Trump aux plus hautes fonctions du pays, Kanye West se rendait à la «Trump Tower», à New York, affichant publiquement son soutien pour le président républicain et posant fièrement devant les photographes, après un entretien d'une quarantaine de minutes. «Nous sommes amis de longue date», avait tout simplement déclaré le chef d'Etat.
Kanye West was just seen at Trump Tower after a meeting with the President-elect https://t.co/Uaa7XsmFuY pic.twitter.com/Jk6fjzS6i8
— CBS News (@CBSNews) 13 décembre 2016
Très critiqué, l'époux de la star de télé-réalité américaine Kim Kardashian a toujours proclamé ne pas se soucier des critiques, prétextant une indépendance d'esprit inébranlable. Conscient de l'influence du rappeur au sein de la communauté afro-américaine, Donald Trump a récemment expliqué sur Fox News : «Quand Kanye s'est exprimé sur sa position il y a quelques mois, quelque chose est arrivé. J'ai fait un bond de 25% dans les sondages. Il est très suivi au sein de la communauté noire. Très très suivi».
Celui qui affirmait récemment que l'eclavage était «un choix», avant de nuancer ses propos face au tollé, s'offusquait face aux caméras du Bureau ovale, le 11 octobre : «Les gens pensent que parce que vous êtes noirs, vous devez être démocrates».
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Autant adulés que détestés, Donald Trump et le désormais surnommé «Ye» ne laissent personne indifférent. Sur son compte Twitter, qu'il supprime selon ses humeurs, l'artiste de 41 ans prêche la bonne parole, avec la même conviction que son alter-ego Donald Trump, également très friand des réseaux sociaux. Jeudi, Kanye West a néanmoins profité de son entretien avec l'époux de Melania Trump pour évoquer le sort de Larry Hoover, un chef de gang de Chicago -la ville où a grandi le rappeur- qui purge actuellement six condamnations à perpetuité.
Peut-être l'interprète de «Famous» souhaite-t-il suivre le chemin de son épouse, qui, après son passage à la Maison-Blanche, avait réussi à obtenir la grâce présidentielle pour Alice Johnson, une détenue de 63 ans condamnée à perpetuité pour son implication dans des affaires de drogue. Une initiative qui pourrait s'avérer payante.
Suite au monologue lunaire du rappeur lors de leur rendez-vous du 11 octobre, Donald Trump, rarement dépourvu de son sens de la répartie, a simplement lancé : «C'était vraiment impressionant».