Le roi d'Espagne Juan Carlos, qui fête samedi ses 75 ans, a accordé son premier entretien télévisé en plus de 10 ans, décidé à reconquérir une popularité au plus bas après un "annus horribilis" 2012, marqué par plusieurs scandales et la crise.
Cette interview pré-enregistrée mais dont rien n'a filtré du côté de la Maison royale, s'inscrit dans une série d'émissions spéciales des médias espagnols consacrées aux 37 années de règne du chef de l'Etat espagnol et une vaste opération de charme lancée depuis plusieurs mois par la famille royale.
Juan Carlos, qui a toujours tenté de donner une image d'un monarque simple, proche du peuple, a tiré sa popularité de son rôle clef dans la transition démocratique du pays après la mort du dictateur Francisco Franco en 1975.
Mais les Espagnols ont été déçus par une série d'affaires qui ont entaché cet image lissée. Et ses récentes apparitions publiques, semblant fatigué mais volontaire après ses opérations des hanches, n'y ont rien changé.
Seule la moitié (50,1%) du pays dresse un bilan "très bon" (6,6%) ou "bon" (43,5%) du règne de Juan Carlos, contre un total de 76,4% un an plus tôt, selon un sondage de l'institut Sigma Dos publié jeudi par le journal de centre-droit El Mundo.
Plus largement, "le soutien à la monarchie tombe à un minimum historique de 54%", affirme le journal.
Et près de 60% (57,8%) des jeunes d'entre 18 et 29 ans n'estiment pas que ce régime soit la meilleure forme de gouvernance pour l'Espagne.
Car la tranche d'âge d'entre 18 et 29 ans "n'a pas vécu la transition, ne connaît pas (cette époque) et ne sent pas non plus un grand intérêt" envers elle, analyse le journal.
En cause, "la gravité de la crise" économique et "les épisodes qui ont touché la famille royale", dit pudiquement El Mundo.
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D'abord le feuilleton depuis fin 2011 de l'affaire de corruption aux Iles Baléares qui touche le gendre du roi, Inaki Urdangarin, marié à sa fille cadette, Cristina. Au point que le couple a disparu des photos et rendez-vous officiels.
En avril, son petit-fils Froilan s'était tiré une balle dans le pied lors d'un entraînement au tir avec son père, Jaime de Marichalar, alors qu'il n'avait que 13 ans, soit en dessous de l'âge minimum légal de 14 ans.
Juste après, Juan Carlos avait dû se livrer à des excuses publiques sans précédent lorsqu'une chute au Botswana a révélé au public qu'il avait chassé l'éléphant en Afrique, lors d'un voyage coûteux, alors que le pays est englué dans la crise.
Très symbolique, la photo de Juan Carlos trébuchant et tombant une nouvelle fois, quelque temps plus tard, a fait le tour du Web, déclenchant les sarcasmes d'internautes.
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Sarcasmes encore lorsque le roi a échappé à l'examen de deux demandes de reconnaissance en paternité, la justice espagnole arguant de "l'inviolabilité de la personne du roi".
Pour reprendre la main, la Maison royale a lancé un nouveau site internet, mettant l'accent sur la lignée royale, la proximité avec les citoyens et "la transparence".
Fin septembre, la Casa Real, qui avait publié fin 2011 pour la première fois ses comptes peu après le début de l'affaire Urdangarin, a annoncé une baisse de 4% de son budget en 2013, à 7,93 millions d'euros, austérité oblige.
En juillet, elle avait déjà annoncé une réduction de 7,1% (20.910 euros) du salaire du roi. Celui-ci avait été fixé auparavant, frais compris, à 292.752 euros par an.
Dans une initiative inédite, la télévision publique a décidé de consacrer à la famille royale une émission hebdomadaire "à vocation clairement informative" d'une demi-heure.
Le roi, qui se pose lui en rassembleur face à la crise et à la poussée nationaliste en Catalogne, devrait, selon la presse, profiter de cet entretien d'une demi-heure pour revenir sur les épisodes qui ont marqué son règne, en évitant soigneusement ceux qui fâchent, et sur l'avenir de l'Espagne.