À l’occasion de la niche parlementaire du groupe Europe Écologie-Les Verts, ce jeudi 30 mai, ses sénateurs entendent remettre à l’ordre du jour une proposition de loi visant à restreindre la fabrication, l'importation et la vente de produits contenant des polluants éternels appelés «PFAS».
La plus grande menace chimique du 21e siècle ? À moins de deux semaines des élections européennes, où l'écologie et la santé figurent parmi les principales préoccupations des électeurs, les sénateurs EELV vont profiter de leur niche parlementaire, ce jeudi, pour présenter le texte, adopté en première lecture à l'Assemblée nationale le 4 avril dernier, visant à restreindre la fabrication, l'importation et la vente de produits contenant des polluants éternels appelés «PFAS», dont la prolifération est un danger de santé publique.
Les substances per- et polyfluoroalkylées, ou PFAS, représentent une vaste famille de plusieurs milliers de composés chimiques. Antiadhésives, imperméabilisantes, et résistantes aux fortes chaleurs, ces substances sont largement utilisées depuis les années 1950 dans diverses applications industrielles et produits de consommation courante : textiles, emballages alimentaires, mousses anti-incendie, gaz réfrigérants, revêtements antiadhésifs, cosmétiques, dispositifs médicaux, ou encore produits phytopharmaceutiques.
L’utilisation large et variée de ces composés chimiques, combinée à leur caractère très persistant, entraîne une pollution de tous les milieux : l’eau, l’air, les sols ou encore les sédiments. Certains s’accumulent dans les organismes vivants, plantes et animaux, et se retrouvent dans la chaîne alimentaire. D’autres, plus mobiles, sont transportés sur de très longues distances par l’eau ou l’air et peuvent se retrouver jusque dans les océans, y compris sur de longues distances.
Des produits du quotidien
Selon un rapport de l’Europan Food Safety Authority publié en 2020, les produits de la mer, les œufs et les viandes sont les aliments contribuant le plus à l’exposition aux PFAS. L’eau destinée à la consommation humaine peut également être une source d’exposition. Des produits du quotidien tels que des poêles anti-adhésives, emballages alimentaires, textiles, produits phytosanitaires peuvent aussi exposer à une contamination.
Par ailleurs, l'exposition professionnelle aux PFAS peut se produire dans plusieurs secteurs industriels, y compris l'industrie chimique, le traitement de textiles, la fabrication de produits électroniques et dans la lutte contre les incendies. Les niveaux d’imprégnation les plus élevés sont relevés chez les travailleurs de sites de fabrication de ces composés polluants.
17.000 sites contaminés
D’après les résultats du «Forever Pollution Project», une enquête menée par Le Monde et dix-sept autres médias européens, il y aurait un total de 17.000 sites contaminés sur notre continent à hauteur de 10 nanogrammes par litre. Parmi ces milliers de sites, 2.100 sont contaminés à des niveaux dangereux pour la santé avec plus de 100 nanogrammes par litre.
Certains d’entre eux sont situés en France, et notamment au sud de Lyon, comme la ville de Pierre-Bénite qui abrite deux usines fabriquant des PFAS, celle d’Arkema et de Daikin. Au total, il existe cinq usines qui produisent ces substances en France. Le «Forever Pollution Project» a aussi comptabilisé 21.500 sites «présumés contaminés».
Ces derniers se trouvent principalement autour des aéroports, à cause des mousses anti-incendie utilisées assez fréquemment dans le cadre d’exercices.
Quelle règlementation ?
La convention de Stockholm (2001), accord international visant à encadrer certains polluants organiques persistants, réglemente plusieurs composés de la famille des PFAS au niveau mondial. La production et l’utilisation du PFOS sont par exemple restreintes depuis 2009 à une liste d’usages spécifiques tandis que les PFOA sont interdits à l’import, l’export, à la production et à l’utilisation, sauf exemptions particulières, depuis 2020.
En Europe, plusieurs actions sont en cours pour étendre la convention de Stockholm à d’autres substances de la famille des PFAS, voire pour réclamer des interdictions définitives. Les initiatives sur le sujet, en Allemagne, au Danemark, aux Pays-Bas, en Norvège en Suède et donc en France, s’inscrivent dans la stratégie de l'UE pour la durabilité dans le domaine des produits chimiques.
En France, à ce stade, un texte a été approuvé à l'unanimité en première lecture le 4 avril dernier, malgré les réticences du gouvernement sur plusieurs points. L'article principal prévoit d'interdire à partir du 1er janvier 2026 la fabrication, l'importation et la vente de tout produit cosmétique, produit de fart (pour les skis) ou produit textile d'habillement contenant des PFAS, à l'exception des vêtements de protection pour les professionnels de la sécurité et de la sécurité civile. Le texte doit désormais être validé par le Sénat.