L’état d’urgence a été déclaré à Lampedusa, une île au sud de l’Italie, après l’arrivée d’environ 6.000 migrants sur ses côtes. Un aveu d’échec pour la politique de Giorgia Meloni, confrontée aux exigences de l’Union européenne.
Un constat d’échec. Environ 6.000 migrants ont été débarqués, ces dernières heures, sur les côtes de l’île de Lampedusa, au sud de l’Italie, faisant craindre «un drame humanitaire» alors que le centre d’accueil des migrants de l’île dispose d’une capacité limitée à 400 places. En déplacement officiel en Hongrie à l’occasion du Sommet pour la démographie, Giorgia Meloni voit sa politique anti-immigration mise à mal par la règlementation européenne, et par la réalité du terrain.
«La situation actuelle à Lampedusa est qu'il y a environ 6.000 personnes dans le centre d'accueil, qui sont arrivées sur l'île sur 120 bateaux différents au cours des dernières 24 heures», a expliqué Francesca Basile, porte-parole de la Croix-Rouge italienne.
Une campagne basée sur la politique migratoire
C’était pourtant le marqueur principal de la campagne de Giorgia Meloni. Le gouvernement mené par la présidente du Conseil des ministres d'Italie avait fait de la réduction des arrivées irrégulières de migrants en Italie sa grande priorité, contribuant notamment à sa victoire électorale. Dans son programme, Giorgia Meloni avait notamment opté pour des mesures telles que le blocus naval anti-migrants, des peines renforcées contre les passeurs, le déploiement de centres de rapatriement, la suppression des permis de séjour pour des raisons humanitaires, et surtout des mesures pour faciliter les expulsions du pays.
Toutefois, pour mettre en œuvre son programme, Fratelli d'Italia devait travailler en étroite coopération avec l'UE, et se soumettre à sa règlementation en matière d’immigration et de droit maritime. À cet égard, Giorgia Meloni s’est retrouvée confrontée à plusieurs difficultés, avec des mesures qui entrent en conflit avec le droit international ou européen, à l’image du blocus naval, qui ne peut être mis en place qu’en cas de guerre, et par le pays attaqué.
Giorgia Meloni bloquée par la règlementation européenne
En effet, malgré la réticence de l'Italie, au terme d'une journée difficile de négociations, les ministres européens de l'Intérieur avaient trouvé un accord, le 8 juin dernier, sur deux volets clés d'une réforme de la politique migratoire. L'accord prévoyait notamment la mise en place d'un système de solidarité dans la prise en charge des réfugiés, alors que l'Europe a enregistré un nombre record de demandes d'asile en 2022.
Par ailleurs, les États membres sont désormais tenus d'accueillir un certain nombre de demandeurs arrivés dans un pays de l'Union européenne soumis à une pression migratoire, ou à défaut d'apporter une contribution financière d'une somme de 20.000 euros pour chaque demandeur d'asile non relocalisé. Des mesures qui s'inscrivent dans une logique contraire au programme développé par Giorgia Meloni.
Lors de ces négociations, une dizaine de pays méditerranéens, dont l'Italie, ont alerté sur leur situation, et marqué leur opposition à l'hypothèse que les États membres de première entrée soient «payés pour garder les migrants irréguliers sur leur territoire». «L'Italie ne sera pas le centre d'accueil des migrants au nom de l'Europe», avait ainsi alerté Matteo Piantedosi, le ministre italien de l'Intérieur.
Face à cette situation, la présidente du Conseil des ministres d'Italie se trouve donc acculée par les critiques dans son pays, en raison de ses promesses non-tenues sur sa politique migratoire. Alors qu’elle doit donner, ce jeudi 14 septembre, une conférence sur la politique démographique et migratoire en Europe, lors du Sommet de la démographie de Budapest, Giorgia Meloni est rattrapée par l’actualité et l’arrivée des 120 bateaux sur l’île de Lampedusa.
L'Italie s'engage à «faire le nécessaire» pour les migrants
De son côté, Antonio Tajani, ministre italien des Affaires étrangères, a assuré que le gouvernement de Rome «fera tout ce qui est nécessaire pour aider les habitants de Lampedusa et les migrants qui continuent d'arriver sur l'île». L'objectif est de «transférer» vers d'autres villes italiennes un maximum de personnes afin de réduire la surpopulation du centre d'accueil de Lampedusa. Un camouflet de plus pour Giorgia Meloni et sa politique migratoire.
À la fin du mois d’août, selon les chiffres officiels sur les huit premiers mois de l’année, le nombre de migrants débarqués sur les côtes italiennes s’élevait à près de 113.500, soit plus du double de celui enregistré à la même période en 2022.