L’élection présidentielle en Turquie a lieu ce dimanche 14 mai et Kemal Kiliçdaroglu est le principal concurrent du chef de l’État sortant Recep Tayyip Erdogan.
Au mois de mars, l’alliance de six partis de l’opposition turque avait désigné Kemal Kiliçdaroglu, leader de sa principale formation Cumhuriyet Halk Partisi (CHP - Parti républicain du peuple, social-démocrate : ndlr), candidat pour affronter à la présidentielle de ce 14 mai le président sortant Recep Tayyip Erdogan, au pouvoir depuis vingt ans.
Aujourd’hui âgé de 74 ans, ce membre de la Grande Assemblée nationale turque a fait ses débuts dans la vie politique en 1999. À l’époque, Kemal Kiliçdaroglu avait soutenu le Parti démocratique de la gauche de Bülent Ecevit lors des élections municipales et législatives. Toutefois, la formation politique ne l’a présenté dans aucune municipalité turque.
De ce fait, le natif de Nazimiye (nord-est de la Turquie) s’est alors tourné vers le Parti républicain du peuple, fondé par Mustafa Kemal Atatürk, lors des législatives du 3 novembre 2002 obtenant ainsi son premier mandat de député d’Istanbul et entrant pour la première fois au parlement turc.
C’est lors de son second mandat, obtenu le 22 juillet 2007, que Kemal Kiliçdaroglu s’est fait connaître auprès des Turcs. À compter de fin 2008, le septuagénaire s’en prend au parti présidentiel AKP dénonçant la corruption de ses membres. Un «bras de fer» qui s’est achevé par la démission de la vice-présidente de la formation «erdoganiste» Saban Disli, accusée par le député stambouliote d’avoir empoché un million d’euros dans une affaire de vente de terrain à Silivri, dans la province d’Istanbul.
Un soutien aux Kurdes et aux conservateurs
Depuis, Kemal Kiliçdaroglu a progressivement transformé la ligne du CHP laissant de côté la défense de la laïcité et de l’héritage nationaliste pour s’ouvrir aux groupes autrefois maintenus à l'écart, comme les Kurdes et les milieux conservateurs.
L'ancien haut fonctionnaire a par ailleurs noué des alliances avec des partis de droite et fait entrer des femmes voilées à sa formation politique au risque de mécontenter ses propres rangs.
En 2017, à l’heure où le pouvoir turc poursuit ses «traqueurs» à la suite d’une tentative de coup d’État survenue en 2016, Kemal Kiliçdaroglu s’est posé en principal adversaire du président Recep Tayyip Erdogan. Et la marche de 420 km entre Ankara et Istanbul qu'il a menée au mois de juillet pour dénoncer l'incarcération d'un député CHP fut pourtant l'une des rares actions menées contre le gouvernement.
Elle a ainsi permis à cet économiste de formation, nommé à la tête de la puissante Sécurité sociale turque dans les années 1990, d'apparaître en leader ne redoutant pas la confrontation.
Deux ans plus tard, la formation politique de Kemal Kiliçdaroglu a raflé les mairies de plusieurs grandes villes, dont Istanbul et Ankara où il a mis fin à vingt-cinq ans de règne du président turc et de son parti.
Issu d’une minorité Alévie
En pleine ascension depuis des années, l’homme de 74 ans a tenté également de séduire la majorité sunnite de la Turquie. Toutefois, certains lui reprochent un manque de charisme et voient ses origines comme un handicap.
Kemal Kiliçdaroglu est en effet issu d’une minorité alévie. Les Alévis sont, depuis longtemps, victimes de discriminations et de massacres en Turquie en raison de leur non-respect à certaines règles de l’Islam, comme par exemple la consommation d'alcool.
Pourtant, la force et la persévérance du septuagénaire ont permis à ses détracteurs politiques de lui accorder d’être un des rares à pouvoir rassembler l’opposition.
Ils lui font aussi confiance pour ne pas se muer en "Erdogan bis" qui abuserait, une fois élu, des très larges pouvoirs accordés au président par l'actuelle constitution, avant le retour au système parlementaire promis par l'opposition.
En cas de victoire face à Recep Tayyip Erdogan, Kemal Kiliçdaroglu serait le premier Alévi à accéder à la présidence turque.