En direct
A suivre

Prix de l’électricité : pourquoi l’Union européenne est-elle pointée du doigt ?

Avec la guerre en Ukraine, les règles qui ont été fixées à l’époque sont devenues inadaptées car le prix du gaz a explosé, entraînant le prix de l'électricité avec lui. [LOIC VENANCE / AFP]

Alors que le marché européen de l’énergie régule le prix de l’électricité en Europe, de nombreuses voix s’élèvent dans l’opposition pour en sortir afin de faire baisser la facture pour les Français. Une décision à laquelle s’oppose fermement le gouvernement, qui milite plutôt pour une réforme du système.

Faut-il sortir du marché européen de l’énergie ? Alors que certains secteurs d’activités comme les boulangers, croulent sous d’énormes factures d’électricité, le système européen du marché de l’énergie est pointé du doigt par l’opposition car il ne serait pas profitable à la France, qui pourrait être en capacité de produire seule son électricité, notamment grâce au nucléaire.

Concrètement, le système est le suivant : les pays de l’Union européenne se sont mis d’accord pour associer leurs moyens de production d’énergie, en utilisant d’abord ceux qui ont les coûts d’exploitation les plus faibles, c’est-à-dire le renouvelable et le nucléaire, puis en dernier ceux qui ont les coûts les plus élevés comme le gaz ou le charbon. Le marché est donc fourni en priorité avec les sources d’énergie les moins chères, mais lorsque la demande augmente, ce sont les plus chères qui prennent le relais.

C'est alors le prix de production de ces sources qui fait office de référence pour l’ensemble du réseau. La raison de ce système est assez simple : inciter les exploitants de ces centrales à continuer à produire, pour s’assurer un filet de sécurité en cas de trop forte demande, et ainsi éviter les coupures.

Contamination du prix du gaz sur le prix de l'électricité

Toutefois, ce système engendre donc ce qu’on appelle un effet de contamination du prix du gaz sur le prix de l’électricité. La France produit par exemple une électricité moins chère grâce à sa capacité nucléaire que l’Allemagne qui produit au gaz, mais nous payons le prix fort en raison de notre participation au marché, qui utilise comme référence le coût du gaz, en raison de la forte demande liée au contexte actuel avec la guerre en Ukraine et la volonté de se sevrer du gaz russe.

Et ce système est valable pour tous les différents pays de l’Union européenne qui sont interconnectés. Pour importer de l’électricité depuis l’étranger, ou en exporter vers les voisins, les pays européens sont reliés entre eux par des câbles qui permettent de transporter l’électricité au-delà des frontières. 

Toujours à propos de l'exemple entre la France et l'Allemagne, les deux pays étant interconnectés, s’il y a de la capacité disponible de l’Allemagne vers la France et que le prix est plus bas en Allemagne, alors l’algorithme va automatiquement proposer des offres d’énergie allemandes aux participants français, ce qui va diminuer le coût de l’électricité en France.

«L’objectif est de garantir un marché performant offrant un accès équitable à celui-ci et un niveau élevé de protection des consommateurs, ainsi que des niveaux appropriés de capacité d’interconnexion et de production», peut-on lire sur le site du Parlement européen.

La guerre en Ukraine fait exploser les prix

Mais avec la guerre déclenchée par Vladimir Poutine, les règles qui ont été fixées à l’époque sont devenues inadaptées car le prix du gaz a explosé, entraînant le prix de l'électricité avec lui. Il s’agit donc d’une conséquence directe des mécanismes mis en place, basée sur la logique de l’offre et de la demande.

Une incohérence soulignée par les oppositions, et reconnue par le gouvernement. «Avoir de l’électricité décarbonée dont le prix est indexé sur les énergies fossiles, c’est stupide économiquement et révoltant d’un point de vue climatique», déclarait Bruno Le Maire sur CNEWS au mois de septembre dernier.

Sortir du marché, la fausse bonne idée ?

Et pourtant, est-il judicieux de sortir du système comme le réclament les oppositions, et en particulier la droite et l'extrême droite ? La réponse est complexe, puisque le marché européen présente également des avantages pour le pays. Par exemple, il permet à la France d'importer facilement de l'énergie quand elle en a besoin, et d'éviter ainsi un black-out ou des coupures en cas de pic de consommation, comme cela a été redouté ces dernières semaines. 

Par ailleurs, il faut également rappeler que ce système permet de stabiliser la santé financière d’EDF, qui peut facilement exporter de l’électricité. De plus, la part du prix au détail payé par les consommateurs en raison de notre participation au marché européen n’est que d’un tiers. Les deux autres tiers correspondant aux coûts d’acheminement et aux différentes taxes.

Enfin, si des pays comme l’Espagne ou le Portugal ont pu bénéficier de dérogations temporaires pour sortir du marché, notamment en raison des spécificités de leurs réseaux électriques et de leurs situations géographiques qui les rendent moins dépendants du réseau européen, la situation de la France n’est pas la même et notre pays pourrait s’exposer à de grosses difficultés d’approvisionnement et donc à des coupures.

S’il exclut donc toute sortie du marché européen de l’énergie, le gouvernement n’y trouve pas son compte pour autant, et pousse pour une réforme globale du système, avec l'appui de la présidente de la Commission européenne, Ursula Von der Leyen, ce qui lui vaut quelques tensions avec l’Allemagne, qui n’a aucun intérêt à ce que le nucléaire français soit favorisé.

À suivre aussi

Ailleurs sur le web

Dernières actualités