Après avoir abrogé le droit fédéral à l’avortement en juin dernier, la Cour Suprême des Etats-Unis entame une nouvelle session de travaux ce lundi 3 octobre avec des dossiers explosifs au programme, comme les droits des Afro-Américains ou des couples homosexuels.
Nouvelle session de la Cour Suprême, nouveaux dossiers brûlants. La session dernière s’était achevée en juin avec la révocation du droit à l’avortement et l’établissement du droit au port d’armes en dehors du domicile, résultat de la supériorité numérique des juges conservateurs au sein de l'institution. Alors qu’une nouvelle session de travaux s’ouvre ce lundi, de nouveaux revirements importants pourraient se produire.
Le 31 octobre prochain, la plus haute juridiction des Etats-Unis doit ouvrir une audience consacrée aux mécanismes de sélections de la prestigieuse université d’Harvard, qui, comme beaucoup d’autres universités américaines, prend en compte des critères ethniques dans le recrutement de ses élèves, pour assurer la diversité des classes et pour corriger la sous-représentation des jeunes noirs et hispaniques issue du passé raciste et ségrégationniste des Etats-Unis. Une «discrimination positive» critiquée de longue date par les conservateurs. Si la Cour Suprême a, par le passé, rendu deux jugements favorables à ces mécanismes de recrutement, le dernier datant de 2016, elle semble désormais prête à faire marche arrière.
Remise en cause des règles électorales ?
Ce mardi, la Cour Suprême va également se pencher sur l’une des lois emblématiques sur le droit de vote aux Etats-Unis, qui a mis fin aux règles ségrégationnistes limitant le droit de vote des Afro-Américains. En effet, la Cour devra examiner l’avis d’un autre tribunal inférieur, qui a invalidé la carte électorale de l’Etat d’Alabama.
L’article 2 du Voting Rights Act prévoit la possibilité de regrouper les électeurs noirs dans une circonscription pour assurer qu'ils aient quelques représentants. Selon CNN, un tribunal de première instance a invalidé la carte électorale de l’Alabama, car n’a été constitué qu’un seul district à majorité noire, alors même que la communauté Africaine-Américaine représente 27% des habitants de l’Etat. Ce tribunal a déclaré que la carte violait probablement l'article 2 car les électeurs noirs ont «moins de chances que les autres Alabamiens d'élire les candidats de leur choix au Congrès», et avait demandé qu’une deuxième circonscription à majorité noire soit tracée.
Cela aurait permis aux Démocrates de gagner un autre siège à la Chambre à l'automne, lors des élections de mi-mandat, puisque les électeurs noirs votent majoritairement pour les Démocrates, quand les électeurs blancs soutiennent davantage les Républicains. Cependant, l’Etat de l’Alabama a saisi la Cour Suprême et demandé de mettre cette décision en attente, ce qu’elle a accepté. Son jugement pourrait donc remettre en question cet article 2 du Voting Rights Act qui assure la représentativité des Africains-Américains lors des élections.
Discrimination contre religion
Enfin, autre sujet qui sera examiné par la Cour Suprême des Etats-Unis : la possibilité de violer les lois anti-discrimination en raison de convictions religieuses. En effet, la plus haute instance juridique du pays a accepté d’étudier le cas d’une graphiste du Colorado, qui souhaite se lancer dans la création de site internet pour des mariages. Cette dernière ne souhaite cependant pas proposer ses services à des couples homosexuels, étant opposée aux unions de deux personnes de même sexe en raison de ses convictions religieuses. Elle estime cependant qu’en vertu des lois anti-discrimination de son Etat, elle ne peut pas librement afficher sa volonté de refuser les couples homosexuels sur le site internet de son entreprise. Cela violerait le premier amendement de la Constitution américaine, à savoir la liberté de religion et d’expression.
La Cour Suprême devra donc se prononcer sur la possibilité des professionnels du monde artistique et créatif de discriminer leurs clients, pour être en accord avec leurs convictions religieuses.
Les récentes décisions conservatrices de la Cour Suprême ont fait baisser sa cote de popularité, comme le rapporte le New York Times. Dans un sondage du cabinet américain Gallup publié la semaine dernière, 58 % des Américains ont déclaré désapprouver le travail de la Cour suprême, le taux le plus élevé depuis 2000. L’arrivée de Ketanji Brown Jackson, première femme noire parmi les juges de la Cour, nommée par Joe Biden, ne change par ailleurs pas l’équilibre de l’institution, qui compte toujours six juges Républicains contre trois démocrates.