Un journaliste algérien a été écroué pour publication de «fausses informations» après un article sur le renvoi vers l'Algérie de dattes exportées au motif qu'elles contenaient des substances nocives pour la santé, a indiqué dimanche son avocat.
Une affaire de dattes qui passe mal. Belkacem Houam, journaliste du quotidien arabophone Echorouk, a été placé en détention provisoire jeudi après son audition par un juge d'instruction d'un tribunal d'Alger. Il est poursuivi en vertu de la loi sur la «spéculation illicite», a précisé à l'AFP son avocat, Me Hassen Brahmi.
Le journaliste est accusé de «diffusion de fausses informations portant atteinte à l'ordre public» et de «diffusion d'informations fausses ou calomnieuses propagées sciemment dans le public afin de provoquer une perturbation du marché et une hausse subite et non justifiée des prix», selon l'avocat.
3.000 tonnes «impropres à la consommation»
Le journaliste a été incarcéré à la suite de la publication mercredi d'un article évoquant «l'arrêt immédiat des exportations» des dattes du célèbre label algérien «Deglet Nour», selon plusieurs sites d'information en ligne.
Le journaliste a expliqué que cette décision était motivée par le «renvoi» depuis l'étranger, notamment de France, de dattes algériennes estimées à 3.000 tonnes jugées «impropres à la consommation». Le ministère du Commerce et celui de l’Agriculture ont catégoriquement démenti l'information d'Echorouk.
«Tout ce qui a été mentionné dans cet article est basé sur des informations injustifiées, dénuées de tout fondement et attentatoire à l'économie nationale et à la richesse que recèle le pays», a affirmé le ministère du Commerce.
Une vague d’indignation
L'incarcération du journaliste a suscité l'indignation et a été abondamment commentée sur les réseaux sociaux, les appels à sa libération se multipliant.
Plus d'une centaine de journalistes ont réclamé, dans une pétition publiée samedi, la libération de leur confrère.
Le Syndicat national des journalistes (SNJ) a dénoncé «une mesure extrême, hautement disproportionnée et qui va à l'encontre de tous les textes en vigueur régissant l’exercice du métier de journaliste et des médias en général en Algérie».
«instrumentalisation» de la justice
La loi algérienne dispose que le délit de presse n'est pas passible d'une peine de prison. L'ancien ministre de la Communication Abdelaziz Rahabi s'est dit «choqué» de «l’arrestation et l’emprisonnement» du journaliste.
«La privation de liberté suite à la publication d’une information de pure nature commerciale est la preuve de la persistance de l'instrumentalisation politique de la justice et relève de pratiques d’un autre âge que l’on pensait révolu», a-t-il dénoncé.