L’armée française a accusé des mercenaires russes d’avoir essayé de faire endosser à des soldats de l’opération Barkhane, des exactions à proximité de la base de Gossi, dans le nord du Mali. L’état-major a alors dénoncé une «attaque informationnelle».
L'armée française a filmé ce qu'elle affirme être des mercenaires russes en train d'enterrer des corps près de la base de Gossi, dans le nord du Mali. Selon, elle, le seul but est d’accuser les Français d'avoir laissé derrière eux un charnier, alors que celui-ci a été découvert quelques heures plus tard par des soldats maliens.
Quant à elle, l'armée malienne a indiqué avoir découvert «des dépouilles en état de putréfaction avancée» près de cette base, que l'armée française lui a restituée mardi 19 avril, et a annoncé l'ouverture d'une enquête.
Dans une vidéo prise par drone à laquelle l'Agence France Presse (AFP) a eu accès, et que l'état-major français qualifie d'«attaque informationnelle». Des soldats en train de s’affairer autour de cadavres qu'ils recouvrent de sable sont alors visibles. Dans une autre séquence, on voit deux de ces militaires filmer les corps à moitié ensevelis.
L'état-major assure qu'il s'agit de soldats blancs qu'il a identifié sur des vidéos et des photos prises à d'autres endroits. Certaines photos montrent par ailleurs des véhicules sortir d'une base dont la structure et l'environnement correspondent à l'emprise de Gossi.
Les clés de cette emprise qui accueillait 300 soldats français ont été remises mardi aux forces armées maliennes (FAMa) dans le cadre du désengagement français du Mali, annoncé en février.
Il s’agit de la première fois que l'armée française diffuse dans un délai si court, des images de drone militaire en vue de contrer une attaque informationnelle, alors que la lutte d'influence fait désormais rage sur les réseaux sociaux.
L'état-major malien a annoncé, de son côté, avoir découvert «un charnier, non loin du camp anciennement occupé par la force française Barkhane», du nom de l'opération française antijihadiste au Sahel. Celui-ci a été découvert par une patrouille envoyée en reconnaissance dans les environs immédiats de la base, et ce, après des tirs survenus peu après le départ des soldats français, a-t-il précisé.
«L'état de putréfaction avancée des corps indique que ce charnier existait bien avant la rétrocession. Par conséquent, la responsabilité de cet acte ne saurait nullement être imputée aux FAMa», a-t-il indiqué dans un communiqué. Le ministère de la Défense a été «saisi pour l'ouverture d'une enquête en vue d'établir toute la lumière sur ledit charnier».
«Une manœuvre de décrédibilisation de la force Barkhane»
Au départ de l'affaire, des images diffusées jeudi sur le compte Twitter d'un dénommé Dia Diarra, qui se proclame «ancien militaire» et «patriote malien». Ce compte a avait été créé en janvier 2022. Après avoir prévenu mercredi 20 avril de la publication imminente d'une vidéo montrant des exactions commises par les Français, il a publié le lendemain une photo de cadavres floutés enterrés dans le sable. Cette photo était accompagné du commentaire suivant : «C'est ce que les Français ont laissé derrière eux quand ils ont quitté la base à #Gossi (...) on peut pas garder le silence sur ça !». Le même compte a publié un peu plus tard une courte vidéo de ces corps à moitié ensevelis.
«On assiste à une manœuvre informationnelle structurée», reposant sur la «montée en gamme d'un premier tweet», a commenté ce vendredi 23 avril, le porte-parole de l'état-major français, le colonel Pascal Ianni.
Le compte de Dia Diarra «est très probablement un faux compte créé par Wagner», la société militaire privée russe, a estimé l'état-major français. «Cette manœuvre de décrédibilisation de la force Barkhane semble coordonnée. Elle est représentative des multiples attaques informationnelles dont les militaires français font l'objet depuis de nombreux mois».
Selon l'armée française, «la comparaison des photos publiées sur Twitter et des images recueillies par le capteur spécialisé permet de faire un lien direct entre ce que font les mercenaires de Wagner et ce qui est faussement attribué aux militaires français».