Alors que la communauté internationale pensait que Vladimir Poutine allait attendre un «faux pas» de l'Ukraine comme prétexte pour envahir le pays, le président de la fédération de Russie a finalement décidé d'y mener une «opération militaire», sur la seule base de l'article 51 de la Charte des Nations unies.
«Les "républiques populaires" de Donetsk et de Louhansk ont demandé l’aide de la Russie. A cet égard, en vertu de l’article 51 du chapitre VII de la Charte des Nations unies, avec l’autorisation du Conseil de la Fédération de Russie [...] j’ai décidé de mener une opération militaire spéciale», a ainsi justifié Vladimir Poutine, avant d'envahir l'Ukraine ce jeudi 24 février.
Cet article – inscrit dans le chapitre VII de la Charte des Nations unies consacré à l'action en cas de menace contre la paix, de rupture de la paix et d'acte d'agression – stipule en effet qu'un pays peut recourir à «la légitime défense, individuelle ou collective [...] dans le cas où un Membre des Nations unies est l'objet d'une agression armée, jusqu'à ce que le Conseil de sécurité ait pris les mesures nécessaires pour maintenir la paix et la sécurité internationales».
Et si Vladimir Poutine n'est évidemment pas en mesure de prouver que la Russie a été victime d'une «agression armée» de l'Ukraine, il évoque néanmoins «l'intimidation» et «le génocide» qu'aurait subi la population des "républiques populaires" de Donetsk et de Louhansk «depuis huit ans [...] de la part du régime de Kiev». Le président de la fédération de Russie a également fait part de son ambition «de démilitariser et de dénazifier l’Ukraine».
L'attaque massivement jugée «injustifiée»
Une position tenue par Vladimir Poutine que ne partagent pas du tout les plus hauts fonctionnaires de la diplomatie internationale, notamment la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et le président du Conseil européen Charles Michel, qui ont conjointement «condamné fermement l'attaque injustifiée de l'Ukraine par la Russie».
Une attaque également jugée «injustifiée» par le président américain Joe Biden, mais aussi par le chancelier allemand Olaf Scholz, qui a quant à lui qualifié l'opération militaire russe lancée en Ukraine de «violation éclatante du droit international».
«Il n'est pas en effet possible d'expliquer que Vladimir Poutine répond à une quelconque attaque de l'Ukraine, puisque le président ukrainien Volodymyr Zelensky a tout fait pour éviter de se montrer menaçant», a avancé Florent Parmentier, professeur de sciences politiques et chercheur au CEVIPOF de Sciences Po Paris sur France Info, notant «l'accélération très rapide» des prises de position de Vladimir Poutine.
Pour le journaliste et expert en stratégie militaire Pierre Servent, interrogé par France Info, les rencontres de Vladimir Poutine ces derniers jours avec Emmanuel Macron et d'autres dirigeants occidentaux n'étaient même qu'«une fausse séquence diplomatique». Et d'assurer : «il fallait vraiment être très aveugle pour ne pas se rendre compte qu'il ne souhaitait absolument pas négocier. Il y a une volonté de restaurer la force et un mépris pour le droit».
Pourtant, selon de récents propos tenus par Florent Parmentier, la Russie n'a en fait «pas grand chose à gagner» à envahir l'Ukraine. Il y aurait «plus à gagner si la Russie [arrivait] à faire accepter aux Ukrainiens les conclusions des accords de Minsk de 2014 et 2015 qui sont aujourd'hui jugés à Kiev comme étant très défavorables aux intérêts ukrainiens».
A noter enfin que l'article 51 du chapitre VII de la Charte des Nations unies mentionne que ce droit à la légitime défense «n’affecte en rien le pouvoir et le devoir qu’a le Conseil de sécurité de l'ONU, en vertu de la présente Charte, d’agir à tout moment de la manière qu’il juge nécessaire pour maintenir ou rétablir la paix et la sécurité internationales».