La France organise ce vendredi 8 octobre à Montpellier un «Nouveau sommet Afrique-France». Pour la première fois de l'histoire des sommets franco-africains, aucun chef d'Etat africain n'a été convié. Emmanuel Macron parie sur la jeunesse et la société civile pour «réinventer» le lien entre la France et le continent.
Quelque 3.000 entrepreneurs, intellectuels, chercheurs, artistes, sportifs, créateurs, influenceurs vont se réunir pour réfléchir au «renouveau de la relation entre le continent africain et la France». Parmi eux, plus d'un millier sont des jeunes du continent ou issus des diasporas africaines en France.
Dans un contexte de crise avec d'anciennes colonies françaises comme le Mali ou l'Algérie, Emmanuel Macron entend poser des bases saines pour un nouveau partenariat. Il dialoguera cet après-midi avec des jeunes de douze pays africains, dont le Mali, la Côte d'Ivoire, la République démocratique du Congo, la Tunisie, l'Afrique du Sud ou encore le Kenya.
De la France en Afrique à l'Afrique en France
«Emmanuel Macron voit bien que la France est en train de perdre pied en Afrique. Sa présence est contestée partout et mise à mal par la mondialisation du continent», analyse pour CNEWS le journaliste Antoine Glaser, auteur de «Le piège africain de Macron» (Fayard). En s’intéressant aux diasporas, «le président français veut passer de la France en Afrique à l'Afrique en France. C'est de la diplomatie d'influence».
Le panel de jeunes a été sélectionné à l'issue d'une longue consultation menée en Afrique par l'intellectuel camerounais Achille Mbembe, à qui Emmanuel Macron a confié la lourde tâche de préparer le sommet.
J’ai formulé un vœu, celui que le Nouveau Sommet @AfriqueFrance soit celui d’un dialogue direct et ouvert, celui de la jeunesse, celui des diasporas. Merci cher Achille Mbembe pour votre contribution. Rendez-vous vendredi à Montpellier ! pic.twitter.com/cETNCCl1CM
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) October 5, 2021
Grand critique du «postcolonialisme», Achille Mbembe est une figure respectée mais dont la nomination a surpris en Afrique. «C'est quelqu'un qui disait : "arrêtons de toujours nous positionner par rapport à la France". Pour beaucoup d'Africains, il s'est trahis en acceptant ce poste», souligne Antoine Glaser.
Erasmus franco-africain
A l'issue du sommet, l'Elysée promet des «propositions concrètes», en partie basées sur un rapport remis par Achille Mbembe à Emmanuel Macron. Le professeur propose notamment la création d'un «fonds d’innovation pour la démocratie», la mise en place d'un Erasmus franco-africain ou encore la fondation d'une «Maison des Mondes africains et des diasporas». Rien qui ne soit de nature à «mettre fin au paternalisme français envers l'Afrique», selon Antoine Glaser.
En 2017, devant les étudiants de Ouagadougou (Burkina Faso), le président français avait déjà promis de tourner la page de la «Françafrique». Un discours voulu comme fondateur mais qui a surtout accouché de gestes symboliques comme la restitution d'œuvres d'arts au Bénin, l'annonce de la fin du franc CFA ou la reconnaissance de la responsabilité française dans le génocide rwandais.
Quatre ans plus tard, beaucoup d'Africains parlent d'un «désenchantement» et citent la présence militaire française au Sahel ou l'adoubement du fils du défunt président du Tchad Idriss Déby comme des exemples d'interventionnisme.