Les sièges rouges du théâtre national de Somalie, à Mogadiscio, sont restés inoccupés pendant des décennies. Mercredi 22 septembre, les habitants les ont pourtant retrouvés pour une soirée historique : la première séance de cinéma organisée dans la capitale depuis 30 ans.
A son âge d'or, Mogadiscio comptait plusieurs cinémas, qui faisaient la joie des Somaliens. Mais la guerre civile, qui a éclaté en 1991, les a tous fait fermer. Le théâtre national lui-même est tombé en désuétude. Au cours de son histoire, l'établissement a même connu des attentats-suicide et servi de base à des chefs de guerre.
Une projection lourde de symboles
Il a finalement rouvert en 2012, mais seulement pour deux semaines. Le théâtre a ensuite été détruit par les shebab, cette milice islamiste liée à Al-Qaïda qui mène régulièrement des attaques dans la capitale. Même s'ils ont été évincés de Mogadiscio il y a 10 ans, ses membres contrôlent toujours de vastes zones rurales.
La projection organisée ce mercredi était donc lourde de symboles. Certains habitants ont d'ailleurs préféré rester chez eux, craignant pour leur sûreté. D'autres ont retrouvé cette salle obscure avec grand plaisir, en se pliant aux contrôles de sécurité exigés aux portes de l'établissement. Le prix du ticket d'entrée était fixé à 8,50€, une somme conséquente pour beaucoup d'habitants de la capitale somalienne.
Dans ce théâtre restauré, situé dans une zone hautement surveillée de la ville, où se trouvent le palais présidentiel et le Parlement, les spectateurs ont renoué avec de vieilles sensations. Le temps de regarder deux court-métrages somaliens, «Hoos» et «Date from Hell», tous deux réalisés par Ibrahim CM. La séance s'est terminée sans incident.
Osman Yusuf Osman faisait partie de ceux qui ne voulaient pas manquer «cet événement historique». Ce passionné de cinéma se souvient du temps où il avait l'habitude de «venir voir des concerts, des pièces dramatiques, des spectacles pop, des danses folkloriques et des films au théâtre national». S'il est «triste» d'avoir laissé cette «vie nocturne» derrière lui, il se réjouit néanmoins d'avoir pu assister à cette projection, la première depuis 30 ans : «C'est un bon début».