Après la Chine, l'Iran et la Corée du Nord, les îles Salomon s'apprêtent à devenir le quatrième pays du monde à interdire Facebook sur son territoire. Une décision que le gouvernement de cet archipel du Pacifique justifie par les propos «abusifs» tenus sur le réseau social, mais vue surtout par ses opposants comme un moyen pour l'exécutif de couper court aux critiques.
«Langage abusif contre les ministres, le Premier ministre, diffamation, calomnie, ce sont des sujets de préoccupation», a déclaré le ministre de la communication Peter Shanel Agovaka au Solomon Times, pour justifier ce projet, validé en Conseil des ministres lundi. Aucune date de mise en oeuvre de cette mesure - que le gouvernement promet temporaire - n'a pour l'instant été évoquée. Le Premier ministre des îles Salomon, Manasseh Sogavare, devrait donner davantage de précisions ce mardi dans un communiqué.
Une porte-parole de Facebook a affirmé à Reuters que le groupe américain discutait de cette interdiction avec le gouvernement salomonais, pour tenter de le faire revenir sur sa décision. «Cette mesure va impacter des milliers de personnes dans les îles Salomon qui utilisent nos services pour se connecter et engager des discussions importantes à travers le Pacifique», a-t-elle déclaré.
Très populaire sur l'archipel, Facebook y compte 120.000 utilisateurs, sur une population totale de 650.000 personnes. La plate-forme est ainsi utilisée par l'exécutif pour fournir des informations de santé publique en ces temps de pandémie de coronavirus. Les discours du Premier ministre sont également souvent diffusés en Facebook live.
Un projet critiqué
Les autorités salomonaises se sont voulues rassurantes, affirmant qu'il ne s'agissait pas d'une attaque contre la liberté d'expression ou la liberté de la presse. Au contraire, selon l'opposition, cette interdiction a pour objectif de réduire la portée et l'audience des critiques contre le gouvernement. Ce dernier est notamment accusé de corruption et de mauvaise gestion dans la distribution des fonds d'aides destinés à faire face à la crise du Covid-19, après avoir été fustigé en fin d'année dernière pour avoir transféré sa reconnaissance diplomatique de Taïwan à la Chine.
Pour certains observateurs, cette décision d'interdire Facebook est justement marquée du sceau de la Chine, à l'influence grandissante dans le Pacifique et où le réseau social de Mark Zuckerberg est banni depuis 2009.