Il a terminé la première étape. Joe Biden sera le candidat démocrate à la présidentielle de novembre 2020 après le retrait de Bernie Sanders le 8 avril. Mais alors que le pays connaît une crise sanitaire majeure, sa campagne s'annonce très compliquée.
Pas de meetings, pas de bains de foule, pas de visites d'entreprises avant plusieurs semaines, voire plusieurs mois. La pandémie de coronavirus rend en effet très difficiles les rassemblements des candidats pour se rendre sur le terrain, et tenter de convaincre l'électorat américain de voter pour eux. Joe Biden va donc devoir faire preuve d'inventivité dans la communication de son message s'il veut exister à l'échelle médiatique pendant la durée de la crise.
Il ne reste guère que les médias télévisés et les réseaux sociaux pour apparaître aux yeux des Américains. Problème, on ne peut pas dire que son équipe ait été la meilleure pour créer du contenu potentiellement viral sur internet, contrairement à Bernie Sanders, ou encore Mike Bloomberg. Nul doute que du recrutement en ce sens sera effectué.
«C'est une candidature difficile à défendre, car Joe Biden est un personnage qui n'a pas grand-chose pour le singulariser», explique Sébastien Mort, maître de conférences en civilisation américaine à l'Université de Lorraine à Metz, et rattaché au Centre de Recherche sur les Médiations. «Ce n'est pas une candidature portée par une adhésion populaire, mais qui résulte d'un choix stratégique des électeurs démocrate. Je ne vois pas comment il peut marketer sa campagne dans ce contexte».
Des meetings qui ne disent pas leur nom
Mais surtout, si lui possède des problèmes de visibilité, son adverse n'en a pas du tout. Donald Trump apparaît en effet tous les jours à la télévision, en direct sur les chaînes d'information, pour le point presse concernant la lutte contre le coronavirus. Au fil du temps, ce qui servait simplement d'une mise au point s'est transformé en meeting présidentiel. «C'est pour cela qu'il prend autant la parole, pour créer du spectacle, ce qui le lie depuis le début à la base fervente de ses supporters», explique Sébastien Mort. Cela explique notamment ses prises de position contre les scientifiques, qui représentent une forme «d'establishment».
Difficile de lutter dans ces conditions pour Joe Biden. S'il peut critiquer la gestion de la crise par Donald Trump, il n'a que très peu d'influence sur les politiques en cours, et semble moins important médiatiquement que des gouverneurs comme Andrew Cuomo (New York) ou Gavin Newsom (Californie). D'autant plus qu'il souhaite organiser une convention nationale des démocrates virtuelle. Cette grande réunion qui vise à nommer officiellement le candidat du parti, tout en soudant les électeurs après des mois de campagnes et attaques internes, est un des moments marquants de course présidentielle.
Si elle se fait par internet, il sera difficile pour le candidat d'avoir une émulation complète des démocrates autour de lui. Mais cela est le fruit d'une réflexion stratégique. «Il fait le choix de la raison. Il veut réhabiliter les scientifiques, par contraste avec à Donald Trump. S’il opte pour une convention en ligne, il se prive d’un événement qui est traditionnellement l’occasion de promouvoir la marque du candidat », analyse Sébastien Mort. Cette stratégie pourra cependant lui jouer des tours en novembre s'il n'arrive pas à trouver une manière de motiver les électeurs de Bernie Sanders, très réfractaires, à lui faire confiance.