Abdelaziz Bouteflika hors du pouvoir, une élection présidentielle repoussée, puis finalement organisée... Il y a un an, le 22 février 2019, les Algériens descendaient dans la rue pour demander la fin du système politique et plus de liberté. Avec la contestation, le pays a connu une série d'événements capitaux pour son futur.
Dès les premières manifestations d'ampleurs, le gouvernement de Bouteflika, que beaucoup pensaient trop solide, a enchaîné les reculades. Le président en place depuis près de 20 ans a d'abord renoncé à sa candidature pour un nouveau mandat, puis repoussé les élections en promettant un référendum constitutionnel.
Tout cela pour arriver, des mois plus tard, à son départ, et à plusieurs reports d'élections. Pendant ce temps, le Hirak (nom du mouvement de contestation), continuait de manifester chaque vendredi. Pourtant, si l'on écoute les retours des concernés, rien n'a véritablement changé.
Et pour cause, le nouveau président élu, Abdelmadjid Tebboune, est issu du FLN et de l'appareil d'Etat algérien. Sa victoire lors du scrutin souffre en plus d'un manque de crédibilité, puisqu'environ 6 électeurs sur 10 ne se sont pas déplacés dans les bureaux de vote.
Tentant d'apaiser les tensions dès les premiers jours de son mandat, une série de prisonniers issus des manifestants avaient été libérés. Cela ne suffit pas à convaincre le Hirak, qui continue de dénoncer un manque de liberté. «Pour l'instant, il n'y a pas vraiment eu de changement, si ce n'est dans la lutte contre la corruption», explique Brahim Oumansour, chercheur à l'Iris et spécialiste de l'Algérie. «Mais le mouvement de contestation a quand même été fragilisé par l'élection, car certains font confiance au président pour apporter des améliorations».
Et maintenant ?
L'une de ses mesures phares pour apporter une sérénité au pays est la promesse d'une nouvelle Constitution. Celle-ci est actuellement en préparation, et devra être terminée puis soumise à un référendum d'ici à l'été 2020. Impossible pour le moment de savoir ce qui se cache derrière celle-ci, même si Abdelmadjid Tebboune promet que «tout est négociable» dans une récente interview donnée au Figaro.
Pour Brahim Oumansour, il ne faut cependant pas trop attendre de cette nouvelle mouture : «réviser la Constitution a déjà été fait en Algérie, sans que cela ne change quoi que ce soit sur le terrain». Dans ce contexte, le nouveau gouvernement doit marcher sur des oeufs. Car si les manifestations sont moins suivies qu'il y a un an, cela ne veut pas dire que le mouvement est en train de mourir. «La moindre réforme impopulaire comme un impôt supplémentaire ou la baisse de subvention pourrait attiser la colère et relancer le mouvement», assure le chercheur.
Il faudra donc réussir à contenter la population, tout en proposant des mesures politiques, économiques et sociales. Le pays est toujours fragile financièrement, dépendant de ses exportations d'hydrocarbures, chose que le président a promis de changer. De leur côté, si les citoyens seront particulièrement attentifs, ils ne devraient pas non plus jouer la carte du blocage à tout prix.
«Avec le Hirak, la population a renoué avec la politique. Elle était dans une culture du rejet, alors que cette année a relancé la culture militante», explique Bahim Oumansour. La majorité du mouvement étant composée de jeunes Algériens, il n'est pas impossible d'assister dans quelques années à une nouvelle classe de dirigeants qui se nourrissent de 2019. Et avec eux, le changement tant attendu ?