Après un marathon d'auditions publiques choc, l'enquête sur l'affaire ukrainienne entre dans une nouvelle phase. En vue: un vote pratiquement certain de mise en accusation (ou «impeachment») de Donald Trump, mais une destitution beaucoup plus improbable.
Si aucun calendrier n'a été officiellement fixé, voici les prochaines étapes attendues, d'abord à la Chambre des représentants, contrôlée par les démocrates, puis au Sénat, à majorité républicaine.
Avant Donald Trump, seuls trois présidents des Etats-Unis ont fait l'objet d'une procédure en vue d'une destitution mais aucun n'a été démis de ses fonctions.
Rapport sur les auditions fleuves
Les commissions de la Chambre chargées de l'enquête ont entendu une quinzaine de témoins dans le secret du huis clos, puis, à nouveau, douze d'entre eux lors d'auditions retransmises dans leur intégralité à la télévision.
Ces dépositions vont servir de base à la commission du Renseignement pour rédiger ses conclusions.
La présidente démocrate de la Chambre, Nancy Pelosi, refuse de donner un calendrier mais elle a indiqué qu'elle ne comptait pas s'embarquer dans de longues batailles judiciaires pour obtenir les témoignages de responsables de la Maison Blanche qui ont refusé de se plier aux convocations.
Objectif : aller vite puisque 2020 sera marquée par la campagne pour la présidentielle de novembre, lorsque Donald Trump briguera un second mandat.
Ce rapport pourrait donc être rédigé rapidement, d'ici le 2 décembre selon des médias américains.
Rédaction des chefs d'accusation
Sur la base de ce rapport et d'autres documents, la commission des Affaires judiciaires de la Chambre, elle aussi à majorité démocrate, devra déterminer les articles de mise en accusation visant Donald Trump.
La Constitution américaine envisage la destitution en cas de «trahison, corruption ou autres crimes et délits majeurs».
Les démocrates ont accusé publiquement le président de «corruption», un signe qu'ils envisagent d'en faire l'un des chefs. Ils martèlent aussi qu'il a commis un «abus de pouvoir», et qu'en refusant de coopérer avec l'enquête de la Chambre, il fait entrave à la bonne marche du Congrès («contempt of Congress») et à la justice, deux chefs d'accusation utilisés contre le président Richard Nixon en 1974.
La commission judiciaire devrait organiser de nouvelles auditions publiques, mais cette fois, le président pourra être représenté par un avocat qui aura le droit d'interroger les témoins et présenter des éléments.
Les membres républicains pourront aussi, en théorie, convoquer d'autres témoins, mais seulement après accord de la commission, à majorité démocrate.
M. Trump crie au scandale tandis que le chef démocrate de la commission, Jerry Nadler, affirme que le fonctionnement était le même lors de l'«impeachment» de Richard Nixon et du démocrate Bill Clinton en 1998.
Vote sur l'«impeachment»
La commission judiciaire devrait ensuite transmettre les chefs d'accusation à la Chambre pour qu'elle les approuve ou les rejette, en séance plénière : c'est l'«impeachment».
Puisqu'ils détiennent 233 sièges sur 435, les démocrates voteront certainement la mise en accusation de Donald Trump.
Ce vote pourrait intervenir avant la fin de l'année.
Procès au Sénat
L'affaire passera alors au Sénat, à majorité républicaine (53 sièges sur 100), pour qu'il organise le procès de Donald Trump sous la supervision du président de la Cour suprême.
Au terme des débats, les sénateurs, faisant office de jurés, devraient voter sur chaque article. Il faut une majorité de deux tiers pour condamner, auquel cas la destitution est automatique et sans appel. Autrement, le président est acquitté.
Télescopage inédit: le procès pourrait intervenir en janvier, juste avant le premier vote crucial de la primaire démocrate, le 3 février dans l'Iowa.
Or six sénateurs démocrates sont candidats et pourraient donc être bloqués à Washington au lieu de faire campagne. Les républicains seraient-ils tentés de faire durer la procédure ?
Le flou demeure sur sa durée.
Lors d'une réunion jeudi, des sénateurs républicains et des responsables de la Maison Blanche ont évoqué selon des médias américains plusieurs options, dont un procès rapide sur environ deux semaines ou une procédure plus longue.
Le procès de Bill Clinton avait duré cinq semaines en 1999. Il avait été acquitté.