L'Assemblée nationale a donné ce vendredi 25 octobre son feu vert à une expérimentation de l'usage médical du cannabis. Dans ce domaine, la France est en retard par rapport à d'autres pays, puisqu'une trentaine d'Etats dans le monde autorisent déjà le cannabis thérapeutique.
Il existe quasiment autant de législations différentes que de pays où le cannabis médical est autorisé. En effet, dans chaque Etat, les maladies concernées par cet usage ne sont pas forcément les mêmes. Idem pour les moyens de se procurer la drogue ou les formes d'administration. Les pays n'ont également pas tous forcément autorisé la production et l'exportation de cannabis médical. Ce qui nous donne un patchwork de situations variées, classifiées ici par continent.
Europe
Dans l'Union européenne (UE), 21 pays sur 28 autorisent, à différents niveaux, le cannabis à usage thérapeutique. Les Pays-Bas ont été le pionnier dans ce domaine, en permettant dès 2003 aux personnes atteintes de maladies graves (sclérose en plaques, sida, cancer, syndrome de la Tourette...) ou de douleurs chroniques de se procurer des médicaments contenant du cannabis ou de l'herbe de cannabis en pharmacie, sur présentation d'une ordonnance médicale.
Chez notre voisin allemand, le cannabis thérapeutique est légalisé depuis 2017. «Les patients pour lesquels toutes autres possibilités de traitement ont été épuisées peuvent obtenir une prescription médicale pour des fleurs de cannabis séchées et des extraits de qualité standardisée délivrés en pharmacie», explique l'Observatoire européen des drogues et des toxicomanies (OEDT) dans un rapport datant de décembre 2018. Mais dans les faits, l'accès reste difficile. Les patients peuvent également acheter des dérivés synthétiques à l'étranger.
Le Royaume-Uni fait de son côté partie des derniers pays européens à avoir autorisé le cannabis à usage médical, en novembre 2018. Il ne peut être prescrit que par des médecins spécialistes (sous formes de pilules ou d'huile mais pas d'herbe à fumer), si tous les autres traitements ont déjà été tentés, en cas de sévère épilepsie chez les enfants, et pour les adultes en chimiothérapie ou souffrant de sclérose en plaques.
Parmi les pays européens qui ont légalisé le cannabis médical, on peut également citer l'Italie (où la marijuana est produite par l'armée), la République tchèque (où la prescription et la délivrance du cannabis sont extrêmement limitées, avec une cinquantaine de médecins et environ quarante pharmacies concernés), la Macédoine du Nord (où le cannabis est disponible sans ordonnance) ou la Norvège (où l'usage thérapeutique est permis sur autorisation des autorités au cas par cas).
Amérique
Au niveau mondial, c'est la Californie qui a été la première région de la planète à légaliser le cannabis médical. C'était en 1996. L'Etat, alors victime d'une épidémie de sida, avait voté une loi en ce sens, à la suite d'un référendum, afin notamment de lutter contre la perte de poids des malades du VIH, la plante étant censée stimuler l’appétit. Depuis, une trentaine d'autres Etats américains - sur un total de cinquante - ont suivi le chemin tracé par la Californie.
«Dans ces Etats, les patients doivent demander une autorisation administrative se basant sur une recommandation médicale d’un médecin et une preuve de résidence dans l’Etat dans lequel la demande est faite», note le Conseil d'analyse économique (CAE), un organisme placé auprès du Premier ministre, dans un rapport datant de juin dernier. «Hormis pour la Californie, une liste de conditions et maladies spécifiques est définie au niveau des Etats, seuls les patients souffrant de ces conditions peuvent recevoir une autorisation», poursuit-il. Des listes qui comportent souvent des éléments assez larges, comme les douleurs chroniques.
Dans certains Etats, tous les produits à base de cannabis, dont la plante fumable, sont autorisés, tandis que dans d'autres, seuls les produits dérivés en spray et les médicaments à base de cannabis sont légaux. Par ailleurs, une dizaine d'Etats américains (dont la Californie) ont légalisé le cannabis à usage récréatif.
Le Canada a de son côté autorisé le cannabis à usage médical dès 2001, pour les personnes atteintes de maladies lourdes ou incurables (sclérose en plaques, cancer, sida, maladie de la moelle épinière, arthrite, épilepsie...). «Les patients atteints de ces affections peuvent obtenir du cannabis auprès du gouvernement, ou obtenir une licence pour cultiver du cannabis pour leur propre usage médical ou le faire cultiver pour leur compte par une tierce personne», indique le rapport de l'OEDT. La consommation peut prendre quasiment toutes les formes : capsules, huile, vaporisateur, herbe à fumer... Mais selon l'OEDT, les médecins sont réticents à prescrire du cannabis à leurs patients. Le Canada est en outre le premier pays du G20 à avoir légalisé la marijuana récréative en octobre 2018.
En Amérique latine, six pays ont légalisé le cannabis thérapeutique. C'est le cas notamment du Chili, premier pays de la région à avoir sauté le pas en 2014. D'abord sous la forme d'une expérimentation, sous l'égide d'une association à but non lucratif. Puis, en 2017, le pays a autorisé la vente de cannabis en pharmacie. En Argentine, seul l'usage thérapeutique d'huile de cannabis est légal sur prescription médicale depuis 2017. Quant au Pérou, il ne l'autorise que pour certaines maladies (Parkinson, cancer, épilepsie...). L'Uruguay est le pays du sous-continent le plus libéral dans ce domaine, puisqu'il a été le premier pays au monde à légaliser le cannabis à usage récréatif en 2013 (et donc aussi à usage médical).
Asie
En Asie, «peu de pays s’intéressent à la question toujours assez taboue du cannabis et des drogues en général», affirme l'étude du CAE.
Israël fait donc figure d'ovni, ayant autorisé la marijuana thérapeutique dès 1999, avant d'étendre sa législation en 2006. Elle peut être prescrite aux patients atteints de cancer, d'épilepsie, de stress post-traumatique ou de maladies dégénératives. Ceux-ci peuvent se la procurer en pharmacie. «En 2018, le pays a autorisé l’exportation et souhaite devenir un leader du marché», souligne le CAE.
En dehors d'Israël, mais aussi de la Turquie, très peu de pays asiatiques autorisent le cannabis médical. La Thaïlande a franchi le pas en décembre 2018, devenant le premier pays d'Asie du sud-est à légaliser la culture de la marijuana à usage thérapeutique. Un accès sur ordonnance médicale, et pour certaines maladies graves comme les cancers.
«Tout récemment, la Chine a décidé de légaliser le cannabis médical et le CBD [une substance non-psychoactive présente dans le cannabis, NDLR] ; 1 600 hectares ont ainsi été autorisés à la culture», note le CAE.
Afrique
Sur le continent africain, seul un pays autorise à l'heure actuelle le cannabis médical. Il s'agit du Lesotho, un petit pays entièrement enclavé dans l'Afrique du Sud, qui a également légalisé sa culture. Une herbe très épurée, puisqu'elle ne peut contenir plus de 0,03 % de tétrahydrocannabinol (THC), l'agent psychoactif du cannabis. Elle contient donc quasiment uniquement du cannabidiol (CBD), substance non-psychoactive.
En Zambie, en Afrique australe, «la légalisation n’est que théorique car aucune autorisation [aux producteurs, NDLR] n’a été délivrée», explique le CAE.
Océanie
En Australie, le cannabis à usage médical est légal depuis 2016. Il fait même partie des pays à avoir autorisé son exportation, en 2018. Mais «les patients ont des difficultés à obtenir une prescription de cannabis», à cause de la résistance des médecins, affirme l'OEDT. L'observatoire note également que «les patients doivent prendre en charge les frais importants liés à l’importation du médicament, par exemple 400 dollars australiens (environ 250 euros) par mois pour du CBD de qualité pharmaceutique pour traiter l’épilepsie».
En Nouvelle-Zélande, plusieurs médicaments à base de cannabis sont autorisés. Auparavant, chaque prescription devait être validée par le ministère de la Santé. Ce n'est plus le cas depuis 2017, les patients pouvant désormais se faire prescrire du cannabis thérapeutique sans autorisation préalable du ministère.