Un tribunal de Moscou devait examiner jeudi au cours d'une audience préliminaire une plainte au civil d'un ressortissant russe contre le géant américain Apple qu'il accusait d'être responsable de son homosexualité. Mais il a retiré sa plainte, expliquant vouloir préserver son anonymat.
L'affaire paraît loufoque, mais elle intervient dans un pays qui punit depuis 2013 la «propagande» auprès des mineurs des «modes de vie non-traditionnels», une législation qui selon les organisations de défense des droits LGBT a jugulé toute forme de militantisme.
Dans sa plainte, le plaignant affirmait avoir téléchargé une application de cryptomonnaies sur l'Apple Store et avoir reçu un virement de 69 «GayCoins» au lieu des bitcoins commandés. Le virement était accompagné d'un message en anglais disant «Ne juge pas avant d'avoir essayé».
Gay, c'est «compliqué»
«J'ai pensé qu'en effet, comment juger quelque chose sans essayer», déclarait M. Razoumilov dans le document. «Et j'ai décidé d'essayer les relations homosexuelles. Deux mois plus tard, je suis plongé dans une relation intime avec une personne de mon sexe et je ne peux pas revenir en arrière». Il réclamait un million de roubles de dommages et intérêts (14.000 euros).
«Cela a porté un coup dur à sa réputation, car il ne sait pas comment le dire à ses parents, et il sait qu'il ne sera pas compris. Nous vivons en Russie après tout, alors ces choses-là sont compliquées», a expliqué son avocate Sapijat Gousnieva, assurant que son client avait quitté une relation stable avec une femme.
Les ONG de défense des droits LGBT considèrent que la Russie mène une politique homophobe avec sa loi contre la «propagande gay». L'homosexualité y était considéré comme un crime jusqu'en 1993 et comme une maladie mentale jusqu'en 1999.
Moscou a aussi été condamné par la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) en juillet pour son refus d'enregistrer trois associations défendant les personnes LGBT.
Silence d'Apple
Pour Sapijat Gousnieva, la plainte était justifiée car «Apple a autorisé cette société (mettant en ligne les 'Gaycoins') à travailler avec eux. Ils ont laissé les gens télécharger l'application.».
Jeudi au tribunal, l'avocate devait présenter ses pièces au juge et demander au géant californien de fournir les contacts d'un représentant de l'entreprise qui mettait en ligne les Gaycoins afin de permettre le dépôt d'une plainte contre cette dernière.