En Bosnie, une histoire d'amour s'est érigée en symbole contre les nationalismes. Elle catholique, lui musulman : la photographie de ces jeunes mariés, séparés par la clôture de leur école qui divise leurs communauté religieuse, a ému le Web.
C'est pour symboliser leur union malgré l'adversité qu'Ella Hrgic Dragoja et Inas Dragoja ont pris ce cliché dans la cour de leur ancienne école le jour de leur mariage, le 22 juin dernier. Enfants, ils partageaient le même établissement scolaire de Travnik, au centre du pays, mais ne s'étaient jamais rencontrés : la cours de récréation étaient en effet séparée par une grille.
D'un côté, Elisabeth, issue d'une famille catholique, suivait le programme scolaire croate. De l'autre, Inas, musulman, fréquentait l'école mixte enseignant le programme bosniaque. Ce n'est qu'à l'université de Sarajevo que les tourtereaux se sont rencontrés pour la première fois.
Pour éviter toute confrontation entre enfants d’origine croate et catholique d’une part, et ceux bosniaques de confession musulmane d’autre part, les récréations étaient en effet décalées d’un quart d’heure.
Le couple, passionné de moto, s'est finalement dit oui à la mairie, sans signes religieux, ni symboles.
«Nous deux, devant l’école qu’on a fréquentée. Dans la cour séparée en deux mondes par une grille, installée par ceux qui ont voulu nous faire croire que celui d’en face était différent de nous, méchant ou moins bien. L’amour fait tomber les frontières, les barrières, les préjugés et l’orgueil», clamait Ella sur son compte Facebook.
La preuve : sa publication a eu un tel impact sur les réseaux sociaux que la grille séparant les deux écoles a été retirée depuis, révèle le site bosnien Klix.
En Bosnie-Herzégovine, ex-république de l'ancienne Yougoslavie, la proclamation d'indépendance, le 6 avril 1992, a provoqué, de la part des forces serbes, une guerre qui dura trois douloureuses et sanglantes années, causant plus de cent mille morts et déplaçant près de deux millions de personnes.
Lors de cette guerre intracommunautaire, la ségrégation entre Croates et Bosniaques était de mise, et certaines traditions, comme la séparation des différents enseignements scolaires perdurent toujours.
En 2016 déjà, la mobilisation de deux amis, relayée par Slate, l'un Croate catholique, l'autre musulman bosniaque, contre un nouveau lycée ségrégué avait permis de bousculer quelque peu les traditions du pays.