Philippe Labro est écrivain, cinéaste et journaliste. Chaque vendredi, pour CNEWS, il commente ce qu'il a vu, vécu et observé pendant la semaine. Un bloc-notes subjectif et libre.
VENDREDI 28 JUIN
Ultime chronique de la saison. La tentation d’un petit bilan du long semestre qui s’achève guette le chroniqueur. Charles Trenet a écrit l’une des plus belles phrases de la chanson française :
– Que reste-t-il de nos amours ?
Alors, que reste-t-il de ces six derniers mois ? Je me méfie des classements : il n’y a pas de hiérarchie des événements. Néanmoins, certains sont évidents. Ainsi, en France, on retiendra évidemment les gilets jaunes, qui vont peut-être continuer leurs samedis jusqu’à… Jusqu’à quand, d’ailleurs, puisque leurs revendications premières sont inaccessibles – départ d’Emmanuel Macron et dissolution de l’Assemblée nationale ? Jusqu’à 2022 ? Le phénomène aura considérablement modifié les mentalités, influé sur les décisions et les comportements. Fait bouger les statistiques et l’économie. Il n’en demeure pas moins qu’Emmanuel Macron a résisté aux épreuves, a su inventer et gérer «le grand débat», et de récents sondages indiquent que sa cote de popularité remonte.
C’est le deuxième fait à retenir : Macron n’a pas vacillé, ni faibli. Il préside, et Edouard Philippe gouverne. L’un et l’autre, tout comme le monde médiatique, se sont «écologisés». Cela dépasse, bien entendu, nos frontières. Il y a de plus en plus d’éléments alarmants (fonte des glaces, espèces en voie de disparition, phénomènes météorologiques) qui forcent le monde – et ses dirigeants – à non plus une réflexion, mais à l’action. Elle doit être universelle. Est-ce concevable ? En attendant, le bon score des écologistes aux élections européennes, grâce à un vote jeune qui a révélé Yannick Jadot, va peser sur les prochaines échéances.
Ce qui frappe, en matière d’affaires étrangères, c’est la dose puissante d’irrationnel qui émane de la Maison Blanche, aux Etats-Unis. Donald Trump a, plus encore qu’auparavant, joué le rôle de grand «disrupteur». Sa base électorale, notamment les «petits Blancs» du Middle West, ne faiblit pas. Il leur propose, pratiquement chaque jour, des tweets parfois totalement contradictoires, comme sa volte-face à propos du drone américain abattu par l’Iran, et une politique qui trouble ceux qui demeurent ses alliés, en l’occurrence l’Europe. Peu nombreux, aux Etats-Unis, imaginent que Donald Trump puisse les entraîner dans un vrai conflit armé. Mais l’inquiétude persiste, et l’interrogation est permanente : que veut-il vraiment ? Où veut-il aller ? Quel est son projet ? En a-t-il seulement un, sinon celui de se faire réélire président des Etats-Unis ?
En fait, dans ce bilan semestriel, on oscille entre le «va savoir» et le «rien n’est joué». Cette sensation d’imprévisibilité et de rapidité de l’information (la faute peut-être aux réseaux sociaux) est sans doute l’une des explications à l’engouement général pour la Coupe du monde féminine de football, qui se déroule en ce moment en France. De la même manière que nous nous sommes passionnés, il y a un an à peine, pour le Mondial des hommes, en Russie, nous avons développé un intérêt singulier pour une équipe féminine, dont le jeu, jusqu’ici, n’a pas forcément été extraordinaire. (Pardon, j’ai péché : j’ai osé émettre une petite réserve !) Mais ce que ces jeunes femmes ont réussi à apporter à une opinion parfois perturbée par les incertitudes, c’est précisément la certitude du sport. En football, comme en toute épreuve sportive, il y a un début, un milieu et une fin. Il y a toujours un instant décisif. C’est cela qui attire les foules : les prolongations, les tirs au but… On accepte la conclusion, concrète, palpable, qui rassure nos angoisses fondamentales. C’est la puissance magistrale du sport. Je vous souhaite à toutes et à tous un bel été.