Des premiers combats de rue ont éclaté dimanche dans un quartier résidentiel de l'est de la ville portuaire de Hodeida, au Yémen, où des forces progouvernementales tentent de briser la résistance des rebelles Houthis, ont indiqué à l'AFP des sources militaires.
Un responsable militaire progouvernemental a affirmé que l'objectif était de «purger» ces rues de toute présence rebelle. Hodeida, ville de l'ouest du Yémen sur la mer Rouge, revêt une importance stratégique car c'est le point d'entrée des trois-quarts des importations et de l'aide humanitaire internationale au Yémen.
Des forces progouvernementales ont pénétré dimanche matin dans un quartier situé entre le sud de l'hôpital du 22-Mai -le plus grand de la ville- et la grande avenue appelée Sanaa, ont indiqué des sources militaires, ajoutant que loyalistes et rebelles se sont affrontés autour d'un complexe touristique appelé Al-Waha (Oasis).
Des habitants d'un secteur situé plus au sud disent avoir entendu tirs et bombardements toute la nuit et de manière sporadique dimanche matin.
«Trois personnes de notre quartier ont été blessées par des éclats d'obus et hospitalisées ce week-end», a dit Marwa, s'exprimant sous un pseudonyme. «Nous sommes vraiment fatigués. On n'est pas en sécurité. Nous n'avons pas d'argent. Cette fois-ci personne ne peut partir. Nous n'en avons pas les moyens et c'est dangereux».
Vendredi, les troupes loyalistes, soutenues militairement par l'Arabie saoudite et les Emirats arabes unis, avaient repris aux Houthis l'hôpital du 22-Mai.
Avant les affrontements dimanche, des sources militaires et hospitalières avaient indiqué qu'au moins 61 combattants -43 rebelles et 18 loyalistes- avaient été tués au cours des dernières 24 heures.
Un médecin à Hodeida avait précisé que des dizaines de Houthis blessés avaient aussi été transportés vers la capitale Sanaa, à l'est, et la province d'Ibb, au sud. L'offensive sur Hodeida a été lancée en juin, mais elle s'est nettement intensifiée depuis le 1er novembre avec un bilan d'au moins 443 combattants tués jusqu'ici dans les deux camps. Les Houthis, qui contrôlent également la capitale Sanaa, sont appuyés par l'Iran.
Le Yémen est le théâtre de la pire crise humanitaire au monde, rappelle régulièrement l'ONU qui précise que 14 millions de civils sont en situation de pré-famine.
De nombreuses organisations humanitaires se sont inquiétées ces derniers jours de l'impact des combats sur des dizaines de milliers de civils piégés dans la ville, ainsi que sur la distribution de l'aide humanitaire à partir du port.
«Le port est ouvert»
Yahya Sharafeddine, directeur adjoint du port de Hodeida situé au nord de la ville, a déclaré dimanche à l'AFP que «jusqu'à présent, le port est ouvert, tout le monde est là et nous travaillons normalement».
Cependant, a-t-il ajouté, «nous ne pouvons prédire ce qui se produira à l'avenir».
Selon des habitants, la coalition antirebelles sous commandement saoudien a recours à des avions de combat et à des hélicoptères d'attaque Apache pour pilonner les positions des Houthis qui ont pour leur part posé de nombreuses mines pour freiner l'avancée de leurs adversaires.
Les rebelles ont enregistré au moins une défection, celle de leur «ministre de l'Information» Abdel Salam Jaber, qui est apparu dimanche, lors d'une conférence de presse à Ryad, où il a évoqué «le dernier souffle» des Houthis.
«Ce qui s'est produit au Yémen est plus dangereux qu'un coup d'Etat», a-t-il clamé en appelant la coalition antirebelles à achever rapidement l'objectif de «libérer» le Yémen de l'emprise des Houthis qui, outre Hodeida, contrôlent la capitale Sanaa et de vastes pans de l'ouest et du nord du pays.
Dimanche soir, le roi Salmane d'Arabie saoudite a reçu à Ryad le prince héritier d'Abou Dhabi, cheikh Mohammed ben Zayed Al-Nahyane, sans que l'agence officielle saoudienne ne précise les sujets discutés, à part «les relations fraternelles» entre les deux pays.
La diplomatie saoudienne a été considérablement affaiblie par l'affaire Jamal Khashoggi, du nom de ce journaliste saoudien tué dans le consulat saoudien à Istanbul le 2 octobre. Ryad avait déjà une mauvaise image en raison du grand nombre de civils tués depuis 2015 dans des frappes aériennes au Yémen.
L'administration américaine de Donald Trump, visiblement sous la pression du Congrès, a confirmé l'annonce samedi par Ryad que la coalition sous commandement saoudien au Yémen allait désormais effectuer elle-même le ravitaillement en vol de ses avions, assuré jusqu'ici par les Etats-Unis.
Depuis 2015, les combats au Yémen ont fait quelque 10.000 morts, majoritairement des civils, et plus de 56.000 blessés, selon l'Organisation mondiale de la santé. Mais des responsables humanitaires estiment que le bilan réel des victimes est bien plus élevé.