Téhéran a annoncé lundi avoir mené une attaque de missiles et de drones contre des positions jihadistes en Syrie, «première phase» de sa «vengeance» après l'attaque ayant endeuillé la ville iranienne d'Ahvaz le 22 septembre.
L'attaque, qui pourrait être perçue comme un nouveau signe de l'avancement des capacités balistiques iraniennes décriées par l'Occident, a visé la région de Boukamal (est de la Syrie), près de la frontière irakienne, selon un communiqué des Gardiens de la Révolution, l'armée idéologique de la République islamique. Ce n'est pas la première attaque aux missiles que mène l'Iran en Syrie. En juin 2017, les Gardiens avaient annoncé avoir détruit des positions du groupe jihadiste Daesh dans l'est de la Syrie à l'aide de missiles tirés de la province de Kermanshah.
«La première phase de la vengeance»
L'opération «Frappe de Moharram» (le mois du deuil musulman, actuellement en cours et particulièrement célébré dans l'Iran chiite) a été menée par «la branche aérospatiale des Gardiens», ajoute le communiqué. Selon les Gardiens, «six missiles balistiques de moyenne portée ont été tirés à partir» de l'ouest de l'Iran à 02H00 du matin (23H30 GMT dimanche) et l'attaque a porté un «coup fatal, à 570 km de distance».
La télévision d’État iranienne a indiqué que les missiles avaient été tirés à partir de la province de Kermanshah, frontalière de l'Irak et qu'ils avaient frappé la localité de Hajin, à environ 20 km au nord de la ville de Boukamal. Cité par l'agence officielle Irna, le gouverneur de Kermanshah, Houshang Bazvand, a démenti des informations publiées sur les réseaux sociaux et selon lesquelles l'un des missiles se serait écrasé peu après son lancement. Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), «de fortes explosions ont eu lieu à l'aube dans la dernière poche sous le contrôle de Daesh, près de la ville de Boukamal». Ce réduit fait l'objet d'une offensive des Forces démocratiques syriennes (FDS), coalition de combattants kurdes et arabes, depuis le 10 septembre.
Les Gardiens de la Révolution ont déclaré que la frappe de missiles a été suivie d'un bombardement mené par «sept drones militaires» contre des installations «des terroristes mercenaires». «La première phase de la vengeance de l'attaque terroriste d'Ahvaz est terminée, d'autres phases viendront», a déclaré le général de division Mohammad Bagheri, chef d'état-major des forces armées iraniennes, cité par l'agence Tasnim, proche des ultraconservateurs. «Ces drones, c'est une première, ont traversé plusieurs frontières et atteint leur cible», a ajouté l'officier.
Attaques «nécessaires»
Tasnim note qu'il s'agit de «la première annonce officielle d'une opération des Gardiens de la Révolution ayant recours à des drones de combat à l'extérieur des frontières iraniennes». Selon elle, les drones utilisés étaient du type «Saegheh» («Éclair» en persan), un modèle développé par l'Iran sur la base d'un appareil américain, le RQ-170 Sentinel, saisi par la République islamique en 2011. L'Iran est, avec la Russie, l'un des principaux soutiens du président syrien Bachar al-Assad et les Gardiens de la Révolution sont présents sur le sol syrien en tant que «conseillers militaires» des forces loyalistes. «De nombreux terroristes (jihadistes) et les chefs responsables du crime terroriste d'Ahvaz ont été tués ou blessés» dans l'attaque sur Boukamal, ont affirmé les Gardiens, sans plus de détails.
Le 22 septembre, 24 personnes ont été abattues par un commando de cinq personnes ayant ouvert le feu à l'arme automatique sur un défilé militaire à Ahvaz, capitale de la province iranienne du Khouzestan, à la population majoritairement arabe. L'attentat a été revendiqué par Daesh et un groupe séparatiste arabe. Le jour même de l'attaque, le président iranien Hassan Rohani avait promis une réponse «terrible», et les Gardiens avaient annoncé une «vengeance inoubliable» dans un avenir proche.
L'attaque de lundi a visé «un repaire connu de terroristes», a déclaré le porte-parole des Affaires étrangères iraniennes, Bahram Ghassemi, jugeant qu'elle était «nécessaire». Le 24 septembre, le guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei, avait établi un lien entre les auteurs de l'attentat d'Ahvaz et les groupes jihadistes opérant «en Syrie et en Irak», les accusant d'avoir été «financés par les Saoudiens et les Émirats arabes unis». Ryad et Abou Dhabi ont démenti.
Accusant les États-Unis, Israël et les «régimes réactionnaires» du Moyen-Orient de soutenir les «terroristes» basés dans l'est de la Syrie à l'origine de l'attentat d'Ahvaz, le communiqué des Gardiens de la Révolution clame que les forces armées iraniennes seront toujours prêtes à répondre de manière «décisive» à l'aventurisme des «ennemis» de la République islamique.