Les bombes syriennes continuaient de s'abattre sur des localités rebelles de la Ghouta orientale, en dépit des appels à l'ONU à l'arrêt du «bain de sang».
Face à cette situation jugée catastrophique par les ONG, les Etats-Unis ont déposé lundi à l'ONU, au 23e jour d'un assaut ravageur, une nouvelle résolution pour un cessez-le-feu immédiat, en dénonçant l'attitude de Moscou et Damas qui «n'ont jamais eu l'intention d'appliquer» une trêve.
L'ambassadrice Nikki Haley a de nouveau menacé Damas. «Nous mettons aussi en garde toute nation déterminée à imposer ses volontés par des attaques chimiques et des souffrances humaines, et en plus particulièrement le régime syrien: Les Etats-Unis restent prêts à agir si nous le devons», a-t-elle dit.
Même si l'intensité des bombardements aériens et à l'artillerie a quelque peu baissé, plusieurs localités de l'enclave rebelle assiégée et morcelée continuent d'être bombardées quotidiennement depuis plus de trois semaines par les forces du président Bachar al-Assad soutenu par son allié russe.
350.000 morts depuis 2011
Dans la Ghouta orientale, 1.170 civils ont péri, dont 241 enfants, et plus de 4.400 ont été blessés depuis le lancement le 18 février par le régime d'une campagne aérienne d'une rare intensité suivie d'une offensive terrestre pour reprendre le dernier bastion rebelle aux portes de Damas, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).
Ces victimes viennent s'ajouter à l'effroyable bilan humain de la guerre, déclenchée le 15 mars 2011, qui a fait plus de 350.000 morts, dont 20.000 enfants, d'après l'ONG. Lundi, 12 civils ont péri dans des frappes du régime sur l'enclave rebelle, dont huit dans les localités de Zamalka et Arbine, selon l'OSDH.
Le régime a réussi, à la faveur de ses opérations militaires dévastatrices, à reprendre 60% de l'enclave et à en isoler les principales localités, avec l'objectif d'affaiblir les rebelles et d'empêcher l'arrivée de renforts. Les rebelles ont riposté en tirant comme d'habitude sur la capitale Damas, où deux personnes ont péri lundi, selon les médias officiels syriens.
A Douma, la plus grande ville de la région qui a été complètement isolée, la situation est restée relativement calme avec des tirs sporadiques, comparé au déluge de feu des dernières semaines, selon un correspondant de l'AFP sur place.
Profitant de ce rare moment d'accalmie, les habitants sont sortis des abris pour inspecter leurs maisons et s'approvisionner. Des résidents ont circulé dans les rues dévastées, d'autres se sont regroupés devant une boucherie, la viande étant assez abondante sur le marché grâce aux fermiers ayant fui les zones rurales prises par les forces prorégime.
Quelque 400.000 habitants de l'enclave rebelle subissent depuis 2013 un siège asphyxiant des forces pro-Assad et la nouvelle offensive a encore détérioré leurs conditions de vie: pénuries de nourriture, de médicaments et nulle part où fuir.
Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a réclamé lui un accès humanitaire immédiat dans la Ghouta orientale, lors d'un exposé sur la non-application de la trêve exigée il y a 15 jours par le Conseil de sécurité. Sans citer la Russie, il a aussi appelé «tous les Etats» à faire en sorte que la trêve soit appliquée. La France a elle demandé à Moscou de faire «arrêter le bain de sang», par la voix de son ambassadeur à l'ONU, François Delattre.
Les civils fuient Afrine
Rétorquant aux mises en cause des Etats-Unis, de la France et de la Grande-Bretagne, l'ambassadeur russe à l'ONU, Vassily Nebenzia, a estimé que ces pays ne sont pas motivés par des considérations humanitaires, en laissant entendre qu'ils cherchaient avant tout à défendre des groupes opposés au régime syrien.
Minée par les divisions, la communauté internationale a été jusque-là impuissante à stopper le conflit.
Le régime d'Assad, avec le soutien vital de la Russie intervenue dans la guerre en 2015 a réussi à enchaîner les victoires face aux rebelles et aux jihadistes et à reprendre le contrôle de la moitié du territoire.
En attendant, dans la Ghouta orientale, le régime mène parallèlement aux bombardements, des négociations en vue de pousser à une sortie des civils qui le souhaiteraient et des rebelles, selon l'OSDH. Ces négociations n'ont pour l'instant pas abouti. Cette politique a été suivie par Damas dans les autres bastions insurgés ces dernières années. Les rebelles contrôlant l'enclave affirment ne pas être partie prenante à ces négociations et rejettent toute évacuation.
Sur un autre front de la guerre aux multiples acteurs en Syrie, la Turquie voisine poursuit son offensive lancée le 20 janvier contre la région d'Afrine pour en chasser les forces des Unités de protection du peuple (YPG), une milice kurde qu'elle qualifie de «terroriste».
Les forces d'Ankara contrôlent désormais près de 60% de cette enclave kurde et avancent désormais de toutes parts vers la ville du même nom, poussant des centaines de civils à fuir, selon l'OSDH.