Dick's Sporting Goods et Walmart, deux grandes enseignes américaines, ont annoncé mercredi leur intention de restreindre la vente d'armes dans leurs magasins, établissant ainsi de nouvelles prises de position marquantes d'entreprises dans le débat sur les armes relancé par la tuerie en Floride.
Alors que beaucoup se sont émus qu'à 19 ans, le tireur de Parkland ait pu acheter légalement un fusil d'assaut AR-15 tout en étant trop jeune, au vu de la loi, pour consommer de l'alcool, le géant des supermarchés Walmart a annoncé qu'il relevait l'âge de vente des armes et des munitions dans ses magasins à 21 ans. «Compte tenu des récents évènements, nous avons revu notre politique sur les armes à feu», a expliqué le groupe dans un communiqué.
Depuis 2015, l'entreprise, qui assure se consacrer avec ses rayons d'armes aux «sportifs et chasseurs», ne vend plus de fusils d'assaut semi-automatiques. A l'époque, elle avait mis en avant non pas des considérations politiques ou sociétales, mais une baisse de la demande. A l'exception de l'Alaska, Walmart ne vend pas non plus d'armes de poing. Plus tôt dans la journée, au moment où les lycéens de Parkland reprenaient le chemin de l'école, Edward Stack, le PDG de Dick's Sporting Goods, une des plus grandes chaînes de magasins de sport des Etats-Unis, annonçait que son entreprise ne vendrait plus de fusils d'assaut semi-automatiques.
«Nous sommes profondément perturbés et attristés par les événements tragiques qui se sont déroulés à Parkland. Nos pensées et nos prières vont aux victimes et à ceux qui les chérissaient», a-t-il réagi.
Le patron a également révélé que sa société avait vendu en novembre 2017 une arme à Nikolas Cruz, responsable de cette tuerie qui a fait 17 morts il y a deux semaines. «Ce n'était ni l'arme, ni le type d'arme utilisé par le tireur. Mais cela aurait pu être le cas», a reconnu Edward Stack. «Les pensées et les prières ne sauraient suffire», a-t-il insisté tout en exhortant à agir pour qu'une telle tragédie de ne se reproduise pas. Outre l'interdiction de ces armes légales dans plus de 40 Etats américains, Dick's ne vendra plus de chargeurs à grande capacité et refusera la vente d'armes aux personnes de moins de 21 ans bien que certaines législations locales l'autorisent.
«Nous vous avons entendus»
Le patron de Dick's s'est efforcé de ne pas heurter les partisans des armes, soulignant «soutenir et respecter le second amendement» de la Constitution qui autorise détention et port d'armes. Pour autant, dit-il, la violence par armes est «une épidémie» qui tue des enfants. Aux lycéens qui se mobilisent depuis la dernière tuerie pour bannir les armes, M. Stack a dit: «Nous vous avons entendus».
L'entreprise «implore» en outre les élus de réformer la législation sur les armes et de mettre en oeuvre des réglementations, à commencer par l'interdiction des armes de types fusils d'assaut semi-automatiques qui font des carnages. Au-delà du symbole, l'annonce d'Edward Stack illustre la pression exercée actuellement sur les entreprises américaines pour se positionner dans le débat sur les armes. Certaines ont d'ores et déjà pris leurs distances, ne souhaitant plus être associées à la National Rifle Association (NRA), le puissant lobby américain des armes, au risque de perdre de nombreux clients.
Difficile neutralité
Les loueurs de voitures Hertz et Enterprise (Alamo, National), les assureurs Metlife et Chubb ou encore la société de sécurité informatique Symantec ont officiellement mis fin vendredi aux avantages consentis aux plus de 5 millions de membres de la NRA. Dans leur sillage, les compagnies aériennes Delta Air Lines et United Airlines ont aussi supprimé les réductions accordées à ces mêmes membres. La NRA a estimé que ces décisions étaient «un affichage honteux de la lâcheté civique et politique».
Ces annonces n'ont pas été sans conséquence immédiate sur les entreprises: un sondage Consult/Politico montre un doublement des consommateurs insatisfaits de MetLife. Delta Air Lines s'est, elle, attirée les foudres du gouverneur adjoint de l'Etat de Géorgie (sud-est). «Je vais tuer toute législation fiscale qui bénéficie à Delta à moins que l’entreprise ne modifie sa position», a menacé Casey Cagle. «Les entreprises ne peuvent pas attaquer les conservateurs sans s'attendre à ce que nous ripostions».
De son côté, FedEx, dans un difficile exercice d'équilibriste, s'est efforcé de rester neutre. Il a argué qu'il ne modifiait pas son activité en fonction des opinions de ses clients tout en soulignant que sa position sur la politique relative aux armes «différait de celle de la NRA». Il estime aussi que les armes représentent «un danger potentiel pour les écoles, les lieux de travail».