A la veille d'un discours attendu sur sa vision de la future relation du Royaume-Uni avec l'Union européenne, la Première ministre Theresa May a rencontré jeudi le président du Conseil européen Donald Tusk, une rencontre au cours de laquelle ils ont acté leur désaccord.
La discussion a été «ouverte et honnête dans une bonne ambiance sur les vraies difficultés politiques qui nous attendent», a commenté une source européenne, tandis que Londres a évoqué une discussion «constructive».
En arrivant à Downing street, Donald Tusk a déclaré qu'il n'était «pas heureux» de la décision de Londres de quitter le marché unique et l'union douanière.
Le président du Conseil européen a rappelé que ces «lignes rouges» fixées par le Royaume-Uni «façonneront la future relation entre le Royaume-Uni et l'UE après le Brexit», selon la source européenne. Une «conséquence possible» est le retour d'une frontière «dure» entre la République d'Irlande et l'Irlande du Nord, avait averti M. Tusk plus tôt.
L'Irlande est l'un des points d'achoppement des négociations entre l'UE et le Royaume-Uni. Après la sortie britannique du giron européen fin mars 2019, l'île risque de voir renaître la frontière entre la république d'Irlande, membre de l'UE, et l'Irlande du Nord, province britannique, qui sortira de l'UE après le Brexit.
Le Royaume-Uni comme l'UE veulent tous deux éviter le rétablissement de cette frontière pour préserver la paix dans l'île, ensanglantée par trois décennies d'affrontements jusqu'à ce que l'accord du Vendredi saint, en 1998 mette fin au conflit en renforçant les liens entre les deux territoires.
Toutefois, ils ne parviennent pas à trouver une solution commune.
Pour la Commission européenne, celle-ci pourrait passer par le maintien de l'Irlande du Nord dans une union douanière avec l'UE, selon un projet de traité scellant le Brexit publié mercredi et traduisant en langage juridique un compromis conclu en décembre 2017.
Mais vendredi, la Première ministre a répété que ce projet était «inacceptable» pour le Royaume-Uni car il «porterait atteinte au marché commun britannique et à l'intégrité constitutionnelle du Royaume-Uni».
Donald Tusk a suggéré à la Première ministre de proposer une alternative.
Ambitieux partenariat
Pour le chef de l'opposition travailliste, Jeremy Corbyn, le Royaume-Uni doit maintenir une union douanière avec l'UE, seule façon de préserver l'emploi et de résoudre l'épineux dossier irlandais.
De son côté, le gouvernement de Theresa May veut quitter le marché unique et l'union douanière mais tout en obtenant un accord qui réduirait autant que possible les droits de douane et les démarches administratives et souhaite un accès «sans friction au marché unique».
Des souhaits contradictoires voire irréalistes, selon les anciens Premiers ministres John Major (conservateur) et Tony Blair (travailliste) et un voeu pieux, selon Donald Tusk : «Soyons clairs : il ne peut y avoir de commerce sans friction en dehors de l'union douanière et du marché unique. La friction est un effet secondaire inévitable de #Brexit. Par nature», a-t-il tweeté jeudi.
Tusk a cependant déclaré en arrivant à Downing street que la décision de Londres de quitter le marché unique et l'union douanière constituait «une sorte d'avancée et nous pouvons commencer nos négociations de fond immédiatement».
A la veille de son allocution, Theresa May a réuni jeudi matin les membres de son cabinet qui ont pu consulter son discours et émettre des observations avant que le texte ne soit finalisé.
«Les ministres ont eu une discussion détaillée et positive et ont convenu que le discours représenterait une véritable avancée dans les négociations», selon un porte-parole du gouvernement.
Elle a aussi informé Donald Tusk du contenu de son discours sur «l'ambitieux partenariat économique qu'elle espère nouer avec l'Union européenne», selon Downing Street.
La Première ministre «espère que les dirigeants européens s'engageront de manière constructive dans cette réflexion».