Les pourparlers de paix sur la Syrie ont repris jeudi à Vienne sous l'égide de l'ONU, dans un contexte de regain de violence sur le terrain qui rend hypothétique l'espoir d'avancées significatives après deux années d'impasse.
Un mois après une précédente réunion infructueuse à Genève, la huitième, des délégations du régime et l'opposition se retrouvent pour deux jours au siège viennois des Nations unies pour ce qui constitue le «dernier espoir de paix», selon le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian.
Les précédents tours de négociations s'étaient soldés par un échec, les deux parties refusant de se parler directement, sur fond de divergences notamment sur le sort du président Bachar al-Assad. De la même façon, aucune réunion commune de l'opposition et du gouvernement syrien n'était prévue à ce stade dans la capitale autrichienne.
Jeudi peu avant midi, le représentant du régime syrien, Bashar Jaafari, est arrivé à l'ONU pour une première réunion avec l'émissaire des nations unies pour la Syrie, Staffan de Mistura, qui chapeaute les discussions. L'opposition a pour sa part annoncé qu'elle serait reçue à 16H00 (15H00 GMT).
Ces pourparlers s'ouvrent à quelques jours d'un «Congrès intersyrien» organisé à Sotchi (Russie) à l'initiative de Moscou et Téhéran, alliés du régime de Damas, et d'Ankara, soutien des rebelles. Sont invités «tous les principaux acteurs régionaux et internationaux», y compris les Kurdes malgré les réticences de la Turquie.
Influence de la Russie
Le négociateur en chef du Comité des négociations syriennes (CNS, opposition), Nasr Hariri, a toutefois souligné que la participation de son mouvement à la rencontre de Sotchi dépendrait de l'issue des négociations dans la capitale autrichienne. Ces pourparlers représentent «un test de la volonté de la Russie de faire usage de son influence sur le régime pour l'obliger à négocier sérieusement» dans le cadre fixé par la résolution 2254 de l'ONU, a-t-il relevé.
Cette résolution adoptée en 2015 prévoit notamment une reconnaissance de l'opposition, l'adoption d'une nouvelle Constitution et l'organisation d'élections libres dans un environnement neutralisé.
Or les combats font toujours rage sur le terrain, où plusieurs offensives militaires ont été lancées : d'une part par la Turquie contre la ville d'Afrine tenue par les Kurdes, d'autre part par le régime contre les rebelles dans la province d'Idleb ainsi que dans la Ghouta orientale près de Damas.
M. Le Drian s'est alarmé d'une «situation de dégradation humanitaire considérable en Syrie» et M. de Mistura a reconnu que les pourparlers viennois intervenaient dans une phase «rès, très critique».
Pour l'expert Firas Modad de l'institut américain IHS Markit, «Assad recherche une victoire (militaire) totale et n'a pas intérêt à trouver un compromis».
Dans ce contexte, seul Moscou apparaît en passe de forcer le régime à prendre les engagements attendus par la communauté internationale, confirment plusieurs observateurs. «C'est le moment pour les Russes de taper du poing sur la table s'ils veulent sauver Sotchi» d'un boycott de l'opposition, résume une source diplomatique occidentale.
Pour tenter d'arracher une avancée, Staffan de Mistura a mis à l'agenda le «volet constitutionnel», moins sensible que la question des élections qui déterminerait in fine le sort du président syrien, chiffon rouge pour Damas.