Le principal opposant au Kremlin, Alexeï Navalny, doit retrouver dimanche matin la liberté, après avoir passé 20 jours en détention, et reprendre le fil d'une campagne électorale dont le cours s'est accéléré en son absence.
Placé en détention pour avoir organisé des manifestations non autorisées contre le président russe Vladimir Poutine, l'avocat et blogueur anticorruption devrait être remis en liberté entre 06H00 et 07H00 GMT, a déclaré à l'AFP son avocat Vadim Kobziev.
Alexeï Navalny, 41 ans, «se rendra directement» à Astrakhan, ville située à 1.300 km au sud-est de Moscou, au bord de la mer Caspienne, où il a appelé ses partisans à se réunir à 14H00 GMT pour une manifestation cette fois autorisée par les autorités locales, a déclaré sa porte-parole Kira Iarmich.
Avec ces manifestations, Alexeï Navalny espère rythmer la campagne électorale de l'élection présidentielle de mars prochain, à laquelle il s'est déclaré candidat.
Inéligible ?
Mais mardi, alors qu'il était encore en détention, la présidente de la commission électorale centrale, Ella Pamfilova, a mis un coup d'arrêt à ses ambitions présidentielles, affirmant qu'il est inéligible jusqu'en 2028 en raison d'une condamnation de justice.
A moins de six mois du scrutin, pour lequel Vladimir Poutine ne s'est pas encore déclaré officiellement candidat, l'opposant ne baisse pas les bras pour autant et devrait continuer à multiplier les déplacements et manifestations pour élargir sa base électorale, concentrée essentiellement à Moscou.
Peu après sa condamnation à 20 jours de prison, il avait ainsi appelé à manifester le 7 octobre, jour de l'anniversaire du président russe. Des milliers de personnes se sont réunies dans plusieurs villes de pays, avec au moins 270 arrestations.
En dépit de l'indifférence des médias publics nationaux, ses meetings avaient également rassemblé en mars et en juin des dizaines de milliers de personnes, souvent très jeunes, à travers la Russie et débouché sur des centaines d'arrestations.
Ces manifestations de printemps, interdites par les autorités, ont valu deux autres condamnations à Alexeï Navalny à des courtes peines : 15 jours pour l'organisation de la manifestation de mars puis 25 jours pour celle de juin.
L'opposant, qui a ouvert des dizaines de bureaux de campagne en province dans la foulée du succès de ces meetings, est souvent la cible d'agressions. Il est aussi l'objet de plusieurs poursuites judiciaires visant, selon ses partisans, à entraver ses ambitions politiques.
Nouvelle rivale
Résolu à mener campagne contre Vladimir Poutine, Alexeï Navalny doit maintenant composer avec un autre coup de théâtre survenu lors de sa détention: l'annonce mercredi soir de la candidature de Ksenia Sobtchak, une vedette de télévision proche de l'opposition.
Cette candidature, que de nombreux médias et analystes ont qualifié de «coup monté» du Kremlin, risque de diviser davantage les rangs des adversaires à Vladimir Poutine.
Dès septembre, alors que cette candidature n'était encore qu'hypothétique, Alexeï Navalny l'avait ainsi vertement critiquée, dénonçant un «plan du Kremlin» et qualifiant de «caricature de candidat libéral» Ksenia Sobtchak, fille du mentor politique du président russe.
En retour, la jeune femme de 35 ans, qui affirme être une candidate «contre tous», l'avait accusé de vouloir garder «le monopole de l'opposition». Elle a cependant ensuite affirmé mercredi soir qu'elle retirerait sa candidature si Alexeï Navalny était autorisé à se présenter en mars.
La sortie de prison dimanche matin d'Alexeï Navalny pourrait donner l'occasion à l'opposant de se positionner clairement face à cette nouvelle rivale, qui a incarné la jeunesse dorée de la première décennie de l'ère Poutine, avant de se rapprocher de l'opposition lors des manifestations de 2011-2012.
Mais, alors que l'opposant est détenu dans une prison de l'ouest de Moscou, la police peut l'avoir transféré ailleurs afin d'éviter toute médiatisation à sa sortie de détention.