Bruxelles accueille jusqu'à mercredi une conférence internationale sur l'avenir de la Syrie, au moment où il y a peu d'espoir de mettre fin à la guerre qui ensanglante ce pays depuis six ans.
Certains acteurs clés du conflit, comme la Turquie ou la Russie, ne devraient d'ailleurs pas être représentés au plus haut niveau à Bruxelles. Cette conférence - à laquelle plus de 70 pays et organisations internationales ont été conviés - servira à faire le point sur les promesses de dons faites par la communauté internationale en février 2016 lors d'une réunion similaire à Londres.
Près de 11 milliards de dollars d'aide et 41 milliards de dollars de prêts à taux avantageux avaient alors été promis sur plusieurs années. Mais l'ONU a fini l'année 2016 sans financements pour près de la moitié de ses programmes liés au conflit syrien, qu'elle a décrit comme «la pire catastrophe provoquée par l'homme depuis la Seconde Guerre mondiale».
Des besoins énormes
Dans les villes assiégées, les quelques hôpitaux ayant résisté aux bombardements, ou les camps de réfugiés des pays voisins, les besoins sont énormes. Pour 2017, les Nations unies estiment avoir besoin de 8,1 milliards de dollars, dont 4,7 milliards pour les réfugiés syriens et les communautés des pays de la région qui les accueillent.
Mais au-delà, l'Union européenne, qui co-organise cette conférence avec les Nations unies, entend mettre tout son poids au service des négociations entre l'opposition et le régime sous l'égide de l'ONU, en évoquant les pistes d'action pour la reconstruction de la Syrie.
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«Bien trop souvent, nous avons attendu que le conflit se termine pour préparer l'après et c'était alors bien trop tard», a expliqué lundi la cheffe de la diplomatie européenne, Federica Mogherini. Elle ne l'a pas explicitement mentionné mais les Européens ont tous en tête l'Irak depuis l'intervention américaine de 2003, ou la Libye, plongée dans le chaos depuis les frappes occidentales en 2011 pour chasser Mouammar Kadhafi.
«Surréaliste»
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Malgré cinq rounds où l'opposition et le régime de Bachar al-Assad ont échangé par l'entremise de l'envoyé spécial de l'ONU, Staffan de Mistura, les négociations de paix n'ont pour l'heure pas véritablement commencé. Il peut donc paraître un peu «surréaliste» de discuter de l'après-guerre, a reconnu Federica Mogherini il y a plusieurs mois. «Nous n'y sommes pas. Ceci ne débutera qu'une fois qu'une transition politique sera entamée», a-t-elle prévenu lundi.
En partie responsable du blocage, la question du départ préalable de Bachar al-Assad en cas d'accord de paix sera «activement» discutée en marge de la réunion alors que les États-Unis ont récemment mis en sourdine cette revendication, selon un diplomate. Lundi, les 28 Etats membres de l'UE ont réaffirmé qu'il »ne saurait y avoir de paix durable en Syrie sous le régime actuel».
Mi-mars, Federica Mogherini avait vanté les «dividendes de la paix» que l'UE pourrait distribuer, espérant «encourager» ainsi les différentes parties qui négocient à Genève à faire les «compromis nécessaires». Si une «transition politique» est «réellement amorcée», l'UE se dit prête à un large éventail d'assistance (levée de sanctions, aide pour organiser des élections, en passant par le financement de programmes de déminage et de démobilisation ou en finançant la restauration de services de base comme l'éducation, la santé ou l'accès à l'eau).
Pas de nouvelles d'Ankara
Plusieurs sessions thématiques sont organisées dès mardi. Mercredi matin, les délégations doivent se retrouver pour une session plénière co-présidée par Mme Mogherini et le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres. Les Premiers ministres libanais et jordanien, dont les pays accueillent plus de deux millions de réfugiés syriens, viendront y exposer les difficultés financières, matérielles, mais aussi sociales qu'engendre cet afflux sans précédent pour leurs populations.
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Également invité, le Premier ministre turc Binali Yildirim n'a donné aucun signe de vie et plusieurs diplomates interrogés lundi par l'AFP tablaient sur le fait qu'Ankara n'enverrait aucun représentant. «Je ne lierais pas cela aux tensions» avec Ankara après le refus de plusieurs capitales européennes de laisser venir sur leur territoire des ministres turcs pour faire campagne en faveur du référendum constitutionnel du 16 avril, a commenté FedericaMogherini.
Les «contacts avec les autorités turques continuent d'être constructifs sur le dossier syrien», a-t-elle assuré. «J'imagine que leur décision sera principalement liée à l'agenda politique intérieur», veut croire la diplomate italienne. Comme l'an dernier, la Russie se fera représenter par un ambassadeur. Le sous-secrétaire d'Etat pour les Affaires politiques Thomas Shannon représentera les Etats-Unis, qui avaient dépêché à Londres leur chef de la diplomatie John Kerry.