Le conservateur David Cameron restera dans l'Histoire comme le Premier ministre britannique qui aura réussi à provoquer la sortie de son pays de l'Union européenne alors qu'il souhaitait l'y maintenir.
David Cameron a joué à l'apprenti sorcier en annonçant en 2013, en vue des législatives de 2015, cette consultation à hauts risques sur une question qui a toujours déchiré son parti. Il a perdu son pari, sa crédibilité et son poste de Premier ministre.
Tirant la conclusion qui s'imposait, il a en effet annoncé sa démission dans la foulée des résultats du référendum, qui sera effective sitôt désigné un successeur par son parti réuni en congrès en octobre.
Paradoxe d'un Premier ministre qui s'est démené pendant des mois pour plaider le maintien de son pays dans l'UE, prédisant le pire en cas de sortie, David Cameron est à l'origine un eurosceptique.
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"Mais un eurosceptique pragmatique", nuance Peter Snowdon, coauteur d'un livre sur ses premières années à la tête du parti conservateur, "Cameron at 10". "Ce n'est ni Edward Heath (europhile), ni Margaret Thatcher (europhobe). Il est beaucoup plus pragmatique, d'où sa difficulté à convaincre les eurosceptiques", estime ce biographe.
"Un très vieux type britannique"
Fils d'une famille fortunée, le lisse et policé Cameron, 49 ans, père de trois enfants, n'a jamais soulevé les passions dans son parti ni auprès des électeurs.
"Il est éduqué mais pas intellectuel, déterminé mais pas dominateur, gentleman mais pas snob (...) il est croyant mais pas trop. Les gens de son espèce ont pas mal de limites -manque d'originalité, absence de passion, tentation de l'auto-satisfaction- mais ils ont jadis dominé le monde", écrit de lui le journaliste et biographe Charles Moore, pour qui il représente "un prototype moderne parfait d'une très vieille espèce britannique".
Education au collège chic d'Eton, fréquenté par son rival Boris Johnson -qui passait à l'époque pour plus brillant et prometteur, selon son biographe Michael Ashcroft-, études à Oxford et entrée en politique: son parcours typique des élites britanniques est sans heurt, son ascension, rapide, jusqu'à son accession à la tête du parti il y a onze ans.
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Il veut alors moderniser la vieille formation et remettre au goût du jour un conservatisme "compassionnel". Il espère aussi mettre fin à ses déchirements sur l'Europe, source de sanglants règlements de compte ayant notamment entraîné la chute de la Dame de Fer. L'idée du référendum est née en pleine montée en puissance du parti populiste et europhobe UKIP en vue des élections européennes de 2014. Et avec un oeil sur les élections générales de 2015.
Arrêt de mort politique
M. Cameron a réussi à emmener son parti vers la victoire en 2015, décrochant même la majorité absolue et laissant sur le carreau son allié libéral-démocrate. Cette spirale de succès a été stoppée net jeudi. La bataille pour sa succession va à présent s'ouvrir, avec au premier rang l'ex-maire de Londres Boris Johnson, qui a pris la tête de la croisade anti-UE.
David Cameron avait déjà annoncé qu'il ne se représenterait pas aux prochaines élections en 2020. En faisant valoir qu'il y avait autre chose dans la vie et notamment sa famille. Il aura désormais plus de temps à lui accorder.