Iran et Turquie se sont engagés samedi à "supprimer les obstacles" sur le chemin d'une meilleure coopération économique entre les deux pays opposés sur le conflit syrien, après la levée de sanctions internationales contre Téhéran.
"Réduire les désaccords bénéficiera d'abord à nos deux pays", a déclaré le président turc Recep Tayyip Erdogan lors d'une conférence de presse commune avec son homologue iranien Hassan Rohani, à l'issue d'une réunion au palais de M. Erdogan à Ankara où les deux hommes ont co-présidé un Conseil de coopération stratégique. L'entretien intervenait au lendemain de vives critiques contre l'Iran de la part des autres pays participant au sommet de l'Organisation de la coopération islamique (OCI) en Turquie. M. Rohani a boycotté la séance de clôture du sommet vendredi pour protester contre la mise en cause de l'Iran, accusé dans le communiqué final de soutenir le "terrorisme".
"La relation Turquie-Iran a malheureusement connu un déclin ces dernières années. Les échanges commerciaux sont tombés à 10 millions de dollars (9,1 M EUR)en raison des sanctions" contre l'Iran, a déclaré Erdogan. "Je pense que nous allons améliorer la situation et atteindre l'objectif de 30 millions de dollars (27,3 M EUR) dans un proche avenir", a-t-il ajouté. "Nous devons supprimer les obstacles", a renchéri Hassan Rohani, faisant référence aux conséquences de l'embargo contre l'Iran. "Les banques turques peuvent ouvrir des succursales en Iran", a-t-il ajouté, insistant sur la nécessité de développer la coopération bancaire et financière.
Le dirigeant iranien a également appelé à plus de coopération énergétique. Ankara est dépendante de la Russie et de l'Iran pour son approvisionnement en pétrole et en gaz mais pourrait privilégier Téhéran en raison du net refroidissement de ses relations avec Moscou, après qu'un avion russe a été abattu en Turquie. Hassan Rohani a toutefois admis des différences sur certaines questions qu'il a qualifiées de "naturelles" tout en assurant, comme son homologue turc, vouloir apaiser les conflits dans la région.
Ankara et Téhéran s'opposent surtout sur la Syrie, l'Iran à majorité chiite soutenant financièrement et militairement le régime de Bachar al-Assad alors que la Turquie, alliée de l'Arabie saoudite à majorité sunnite, aide des groupes rebelles. "Ce qui compte c'est l'unité du monde arabe", a déclaré M. Rohani. "Nous devons dire au monde: notre identité c'est l'islam, que l'on soit sunnite ou chiite, ou autre", a-t-il poursuivi. L'OCI avait condamné vendredi le "soutien continu au terrorisme" de l'Iran, et son "ingérence dans les affaires intérieures des États de la région et des autres États membres, y compris à Bahrein, au Yémen, en Syrie, et en Somalie".
Les représentants de 56 pays ont participé jeudi et vendredi au sommet de l'OCI, dont le roi Salmane d'Arabie saoudite. Ryad et Téhéran sont en crise ouverte depuis le saccage en janvier de représentations diplomatiques saoudiennes en Iran après l'exécution d'un religieux chiite par l'Arabie saoudite. A Ankara, M. Rohani ne s'est pas rendu au mausolée de Mustafa Kemal Ataturk, fondateur de la Turquie moderne et symbole de son sécularisme. Le mausolée est une étape obligée pour les responsables étrangers dans la capitale turque, mais les dirigeants de la république islamique iranienne ne se plient pas à ce protocole.