Les premiers réfugiés en provenance de Grèce devraient arriver sur le territoire turc ce lundi malgré les critiques venues des humanitaires.
Leur rêve d’Europe s’éloigne encore un peu plus. Ce matin, l’accord signé le 18 mars dernier entre les vingt-huit membres de l’Union européenne et la Turquie, afin d’endiguer la vague de migrants, doit être mis sur pied. Un texte qui prévoit notamment que pour chaque Syrien rapatrié par Ankara un autre sera réinstallé vers l’UE (dans une limite de 72 000). Dès ce week-end, les nombreux pays concernés étaient donc sur le pont pour mettre en place cette mécanique complexe.
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Selon l’agence de presse grecque ANA, quelque 750 personnes devraient être renvoyées en Turquie entre aujourd’hui et mercredi. Si les détails de l’opération n’ont pas été révélés, les premiers concernés pourraient être les quelque 6 000 migrants arrivés sur les îles de la mer Egée depuis le 20 mars dernier. Afin de prendre en charge au mieux ce premier contingent, les autorités turques préparaient ces derniers jours deux centres d’enregistrement. Deux structures permettant de prendre les empreintes des personnes rapatriées, mais qui ne devraient être qu’une étape avant le placement dans un camp de réfugiés. Frontex, l’agence européenne de surveillance des frontières de l’UE, est également sur le qui-vive. Deux de ses navires ont été mobilisés, ainsi qu’environ quatre cents policiers chargés d’escorter les migrants.
De son côté, la France a envoyé cinquante CRS sur l’île de Lesbos dès samedi. Selon le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve, ils devaient être suivis hier et aujourd’hui par «vingt-deux policiers de la préfecture de police de Paris et cinquante gendarmes», ainsi que des spécialistes de l’asile, appartenant notamment à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) Dans le même temps, Paris (et Berlin) a donné son accord pour l’accueil de plusieurs dizaines de Syriens (81).
Des craintes humanitaires
Si l’accord se concrétise aujourd’hui, il n’en reste pas moins décrié par certains. Vendredi dernier, Amnesty International a accusé Ankara de renvoyer une centaine de Syriens par jour dans leur pays ravagé par la guerre. «Ce sont des retours forcés, des femmes enceintes, des enfants parfois sans leurs parents», assure Geneviève Garrigos, la présidente d’Amnesty France. Samedi, c’est le conseiller spécial de l’ONU sur les migrations, Peter Sutherland, qui s’est inquiété d’un accord potentiellement «illégal».
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Mais au-delà de ces craintes, l’efficacité de ces renvois est mise en cause. Hier, le président autrichien Heinz Fischer s’est déclaré «sceptique» quant à la réussite d’un tel procédé. «S’ils ne passent pas par la Grèce, ils retenteront par d’autres routes, plus dangereuses, estime Geneviève Garrigos. C’est inhumain.»