Le pape François a très fermement condamné jeudi la radicalisation des jeunes qui sont «rendus extrémistes» pour commettre des «attaques barbares» injustifiables au nom de Dieu, appelant musulmans, protestants et catholiques à résister ensemble.
«Notre conviction commune est que le Dieu que nous cherchons à servir est un Dieu de paix ! Son saint Nom ne doit jamais être utilisé pour justifier la haine et la violence», a t-il répété. A la nonciature apostolique (ambassade du Saint-Siège) à Nairobi, Jorge Bergoglio s'adressait au deuxième jour de son voyage en Afrique aux représentants des Eglises anglicanes, luthériennes, méthodistes, pentecôtistes, ainsi qu'aux dignitaires de l'islam et des religions animistes.
«Je sais combien est vivant en vous le souvenir laissé par les attaques barbares au centre commercial Westgate (de Nairobi), à l'université de Garissa (est) et à Mandera (nord-est)», a-t-il lancé dans une allusion à une série d'attaques spectaculaires et meurtrières menées au Kenya par les islamistes shebab somaliens depuis deux ans.
«Trop souvent des jeunes sont rendus extrémistes au nom de la religion pour semer discorde et peur et pour déchirer le tissu même de notre société», a-t-il lancé deux semaines après les attentats de Paris commis par des jeunes musulmans radicalisés. Pour cette raison notamment, a-t-il dit, «le dialogue oecuménique et interreligieux n'est pas un luxe, n'est pas optionnel, c'est quelque chose dont notre monde, blessé par des conflits, a toujours plus besoin». Il a «réaffirmé l'engagement» pris par l'Eglise catholique au Concile Vatican II (1962/65) pour ce dialogue.
Appel à l'unité
Au nom des musulmans, Abdulghafur El-Busaiyn, président du SUPKEM (Conseil suprême des musulmans kényans), a exhorté que «comme peuple d'un seul Dieu, nous (chrétiens et musulmans) fassions front et soyons unis, que nous nous donnions la main pour tout ce qui est essentiel pour notre humanité, sans distinction de lieu, de culture, de langue, d'ethnie, de race, de statut, de politique». «Aujourd'hui nous sommes pris par les mirages de politiques sans principe, d'affaires sans morale, de fortune sans travail, d'éducation sans caractère, de science sans humanité, de plaisir sans conscience, de religion sans spiritualité, et de compétences sans responsabilité professionnelle. Nous ne pouvons sûrement pas continuer dans cette direction», a lancé Abdulghafur El-Busaidy, qui représente les 30% de musulmans du Kenya.
L'archevêque anglican Eliud Wabukala a condamné «le colonialisme idéologique des styles de vie sécularisés» importés de l'Occident, et dénoncé l'affaiblissement du lien social qui pèse sur la coexistence pacifique entre religions : «Dans le passé récent, nous avons été témoins d'activités accrues de terrorisme et de radicalisme, qui menacent la coexistence pacifique et l'intégration entre fois et communautés au Kenya». Le pape argentin effectue son premier voyage en Afrique, successivement au Kenya, en Ouganda et en Centrafrique, trois pays touchés par les violences interreligieuses.