Si l'attention des médias se concentre sur la candidature d'Hillary Clinton en vue de la prochaine élection présidentielle américaine, son rival du camp démocrate Bernie Sanders pourrait bien lui faire de l'ombre.
Bernie Sanders est le premier étonné, à l'en croire, du nombre de personnes se pressant récemment pour l'écouter faire campagne pour la Maison Blanche. "J'étais vraiment surpris. Nous avons eu beaucoup, beaucoup de monde, très enthousiastes", a dit cette semaine à l'AFP le sénateur indépendant, de passage au Capitole à Washington entre deux déplacements de campagne. "Je pense que nous touchons une corde sensible".
4.000 personnes dans le Minnesota il y a deux semaines, quelque 800 sur un campus de l'Iowa, et 5.000 déjà inscrites pour samedi dans le Colorado : à ce stade de la campagne électorale, les primaires ne commençant que dans sept mois, voilà des chiffres inhabituels. Selon son entourage, la campagne pourrait même battre le record de l'année samedi dans le Colorado, parmi les candidats à la présidentielle.
"Socialiste démocrate"
Bernie Sanders revendique l'étiquette de "socialiste démocrate", et sa campagne pour l'investiture démocrate, face à la favorite Hillary Clinton, est menée à gauche toute. "Les Américains en ont ras le bol d'une économie où 99% de tout l'argent va dans les poches des 1% les plus riches", dit-il. "Ils veulent changer fondamentalement un système politique qui permet aux milliardaires d'acheter les élections".
La "surprise" témoignée par Bernie Sanders fait partie de l'image d'outsider qu'alimente sciemment le sénateur de 73 ans, qui se félicite de n'avoir pas de consultant surpayé à son service, ni de grosse infrastructure de campagne comme Jeb Bush ou Hillary Clinton. "Les gens pensent qu'il est crédible", dit son conseiller Tad Devine, qui l'appelle tout simplement "Bernie", comme sur les affiches de campagne du candidat.
Combattre les inégalités
Les inégalités de revenus, le financement électoral, le changement climatique, les congés maladie payés : "il parle depuis longtemps de ces questions fondamentales", souligne le conseiller. Bernie Sanders est aussi fier de n'avoir pas l'appui de ces comités spéciaux capables légalement de recueillir des dons illimités, et dont profitent les grands candidats pour contourner les restrictions légales. Son entourage assure que l'argent afflue néanmoins, de petits dons en petits dons.
L'objectif : 40 à 50 millions de dollars d'ici la primaire du New Hampshire, début 2016, une somme qui lui assurerait une formidable présence médiatique face à Hillary Clinton.
The Charleston church killings are a tragic reminder of the ugly stain of racism that still taints our nation. pic.twitter.com/3R4zKLqq2q
— Bernie Sanders (@SenSanders) 18 Juin 2015
Une place aux débats télévisés
Reflétant ou alimentant le succès de Bernie Sanders, un sondage publié cette semaine par l'Université Suffolk montre le candidat à 31% des intentions de vote de la primaire du New Hampshire, contre 41% pour Hillary Clinton. Une enquête réalisée auprès de seulement 500 électeurs démocrates de l'Etat, avec 4,4 points de marge d'erreur, mais significative de la poussée Sanders dans un Etat qui sert de tremplin aux primaires. "Ça ne me surprend pas", dit son collègue du Vermont Patrick Leahy, un démocrate. "Il parle haut et fort".
Au niveau national, il s'est installé à la deuxième place, sa cote restant toutefois bien inférieure: seulement 12% des intentions de vote des démocrates, loin derrière les 59% d'Hillary Clinton, selon la moyenne des sondages calculée par le Huffington Post. Jusqu'où ira-t-il ? Sa place sur la scène des débats télévisés des primaires semble assurée, en l'absence d'autres candidats sérieux. Mais ses chances de battre Hillary Clinton, à moins d'un coup de théâtre, sont jugées infimes.
"Outsider"
"C'est un outsider dans un processus contrôlé par les insiders", estiment les politologues de l'Université de Virginie dans leur dernière analyse. Contre Hillary Clinton, dont les réseaux à l'intérieur du parti démocrate et parmi les donateurs du pays sont entretenus depuis trois décennies, Bernie Sanders ne semble pas faire le poids.
Mais le candidat est déterminé à pousser Hillary Clinton dans ses retranchements, en la pressant de se positionner sur des sujets chers à l'aile gauche du parti démocrate, comme le projet d'oléoduc Keystone XL, honni par les écologistes, et qui fut autrefois de la responsabilité de la secrétaire d'Etat.