Pedro Sanchez, qui a conquis les socialistes espagnols par son charisme et ses paroles positives, a appelé dimanche, dans son discours d'investiture, le parti socialiste, aujourd'hui exsangue, à "remettre l'Espagne en marche" et à reconquérir le pouvoir perdu en 2011.
En chemise blanche, le geste déterminé, haussant la voix pour mieux convaincre, ce député de 42 ans, il y a peu encore inconnu du grand public, venait d'être désigné par 86% des 3.000 délégués du Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) nouveau secrétaire général de ce parti, première force d'opposition au gouvernement conservateur de Mariano Rajoy.
Et si des primaires ouvertes doivent encore désigner celui qui affrontera la droite aux élections législatives de 2015, c'est bien un discours-programme qu'a prononcé, pendant près d'une heure, Pedro Sanchez.
Sous les acclamations, il a appelé son parti à "se mettre au travail" pour relever un pays "excédé, indigné, blessé", meurtri par six années d'une crise économique qui laisse un quart des actifs au chômage.
"Nous sommes à nouveau debout pour remettre l'Espagne en marche", a-t-il lancé, dans son intervention, dressant un état des lieux sans concessions et multipliant les promesses, ce qui fait de ce novice un acteur désormais incontournable de la vie politique espagnole.
Lundi, il sera reçu par Mariano Rajoy, se présentant comme un interlocuteur "loyal" mais décidé à se faire entendre sur les dossiers les plus chauds, à commencer par celui de l'indépendantisme catalan : s'il se dit opposé au référendum que veulent organiser les nationalistes en novembre, il plaide en revanche pour une révision de la Constitution de manière à conduite l'Espagne vers plus de fédéralisme.
"Je suis un militant de base qui, il y a un an et demi, n'était pas dans la politique", se plaît pourtant à raconter ce professeur d'économie au sourire conquérant, militant socialiste devenu député de Madrid en 2009, en 2011, puis à nouveau en 2013, à chaque fois sans avoir été élu, après le départ d'un parlementaire.
- Un parti décomplexé -
En quelques semaines, devenu la vedette des plateaux de télévision, il aura balayé ses rivaux, jusqu'à être élu le 13 juillet par les militants socialistes pour succéder à Alfredo Perez Rubalcaba. A 62 ans, ce vétéran de la politique venait de démissionner au lendemain de la déroute du parti aux élections européennes du 25 mai.
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"Je vous propose que nous abandonnions une fois pour toutes les complexes", s'est exclamé Pedro Sanchez dimanche, alors que le PSOE est tenu pour responsable du marasme économique dans lequel l'Espagne est plongée depuis l'éclatement de la bulle immobilière en 2008.
Revendiquant l'héritage de ses prédécesseurs, Felipe Gonzalez, chef du gouvernement de 1982 à 1996, et José Luis Rodriguez Zapatero (2004-2011), il a cité "l'éducation publique, la santé publique", le mariage homosexuel ou la loi sur l'interruption volontaire de grossesse, l'une des lois-phare du second gouvernement Zapatero que la droite entend aujourd'hui remettre en question.
Promettant de "moderniser" un pays "puni par une crise économique sans fin", "éloigné de ses institutions", le nouveau secrétaire général a demandé aux socialistes de "se mettre au travail pour bâtir une Espagne meilleure", "où les chômeurs auront des prestations sociales garanties", "où le terrorisme machiste sera éradiqué", "où les jeunes trouveront du travail à vingt ans et pas à trente".
Il a annoncé, si les socialistes revenaient au pouvoir, "une loi d'égalité salariale entre hommes et femmes", ainsi que l'abrogation de la loi sur le marché du travail, l'un des instruments de la politique d'austérité suivie depuis 2012 par Mariano Rajoy.
Dénonçant au passage "le patriotisme de ceux qui choisissent le patrimoine au lieu de la patrie", il a promis de lutter contre la fraude fiscale, l'une des plaies de l'économie espagnole, et de publier chaque trimestre les comptes du parti.
Se défendant de toute démagogie, il répond sur ce terrain aux petites formations de gauche qui, depuis 2011, empiètent sur l'électorat des deux grands partis traditionnels, le Parti populaire, de droite, et le PSOE, profitant de la perte de confiance engendrée par la crise et la multiplication des affaires de corruption.