Les différends maritimes entre la Chine et ses voisins promettent une nouvelle fois de s'inviter au sommet de l'Asie du Sud-Est, ouvert mercredi au Brunei, Pékin ayant de plus le champ libre en l'absence de Barack Obama.
Le président américain, déjà regretté au sommet de l'Asie-Pacifique qui vient de s'achever sur l'île indonésienne de Bali, manquera à nombre de pays participant au sommet annuel de l'Asean (Association des nations d'Asie du Sud-Est), qui s'élargira jeudi à un sommet de l'Asie de l'Est (EAS).
Les petits pays qui s'opposent aux prétentions maritimes et territoriales de Pékin, comme le Vietnam ou les Philippines, comptent sur les Etats-Unis pour contrecarrer la toute-puissance du géant chinois.
M. Obama, retenu par la crise budgétaire chez lui, a annulé in extremis l'importante tournée qu'il devait effectuer dans la région. Le secrétaire d'Etat John Kerry le remplacera mais c'est un pis-aller pour nombre d'alliés dans la région.
"Je suis certain que mon absence ne dérange pas les Chinois", a ironisé M. Obama, mardi lors d'une conférence de presse à Washington, assurant cependant que l'annulation de sa tournée ne provoquera pas de "dégâts durables".
"A court terme, cela affaiblit Obama... tandis que les dirigeants chinois font figure de leaders d'une future super-puissance", estime Ian Storey de l'Institut de Singapour pour les études sur l'Asie du Sud-Est.
Dans le sultanat de Brunei, M. Obama ne pourra pas peser de tout son poids pour pousser la Chine à accepter un code de bonne conduite en mer de Chine méridionale, censé prévenir la détérioration des conflits territoriaux.
L'Asean discute depuis dix ans avec Pékin de ce code mais la Chine préfère les négociations bilatérales où, selon ses détracteurs, elle peut bénéficier à plein de tout son poids de géant asiatique.
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Pékin revendique quasiment toute la mer de Chine méridionale, carrefour de routes maritimes vitales pour le commerce mondial, et réserve potentielle d'hydrocarbures.
Lors d'un discours historique devant le Parlement indonésien la semaine dernière, Xi Jinping a promis une résolution "pacifique" des différends et de "travailler de concert afin de forger des liens plus serrés entre la Chine et l'Asean".
Mais cela pourrait n'être qu'une tactique visant à gagner du temps, pendant que la Chine renforce encore son arsenal militaire, soulignent des observateurs.
Lundi, le vice-ministre chinois des Affaires étrangères, Liu Zhenmin, a une nouvelle fois accusé "l'implication de pays étrangers" de "ne pas faciliter l'édification d'un consensus".
L'Asean, qui regroupe dix pays d'Asie du Sud-Est, est sur ce sujet tiraillée entre le Cambodge, fidèle allié de la Chine, et les Philippines, le Vietnam, la Malaisie et Brunei, qui ont de vifs différends territoriaux maritimes avec Pékin.
Quand le sommet s'élargira jeudi à l'Asie de l'Est plus les USA, un autre différend viendra s'ajouter: celui opposant Pékin à Tokyo en mer de Chine orientale cette fois, où la Chine revendique un petit archipel désert administré par le Japon sous le nom de Senkaku (Diaoyu pour Pékin).
Le président Xi a échangé une poignée de main furtive avec le Premier ministre japonais Shinzo Abe au sommet de l'Asie-Pacifique à Bali. Et au Brunei, aucun entretien bilatéral n'est programmé entre le Premier ministre chinois Li Keqiang, qui représentera Pékin, et M. Abe.
Le sommet de l'Asean doit également être l'occasion de faire progresser l'idée d'un marché commun de l'Asie du Sud-Est, qui regrouperait 600 millions d'habitants. L'ambition est de l'atteindre en 2015 mais beaucoup doutent que cela soit possible.
"Avec deux ans devant nous, nous faisons encore face à des défis dans la mise en oeuvre de notre feuille de route", a reconnu de manière diplomatique le sultan du Brunei, Hassanal Bolkiah, en ouvrant le sommet.