Le chef démissionnaire du gouvernement italien Mario Monti a fait un nouveau pas vendredi vers un engagement direct dans la campagne des législatives en acceptant d'être le "chef d'une coalition" centriste et réformatrice qui sera en lice pour diriger l'Italie aux élections de février.
"J'accepte d'assumer le rôle de chef de la coalition et je m'engagerai pour garantir le succès de cette opération", a déclaré M. Monti au cours d'une conférence de presse impromptue, à l'issue d'une rencontre de quatre heures avec des représentants centristes et d'organisations civiques.
M. Monti, un ancien commissaire européen qui a dirigé pendant un an un gouvernement de technocrates en pleine tempête sur la zone euro, avait été jusqu'à présent plus ambigu et prudent.
Dimanche, au cours de sa conférence de presse de fin d'année, le président du Conseil s'était dit prêt à "donner son opinion, son encouragement et (à leur demande, ndlr) à diriger les forces" adhérant à un programme précis, appelé Agenda Monti.
Dans la pratique, M. Monti ne sera pas directement candidat car il est déjà sénateur à vie. Mais son nom figurera sur une série de listes électorales qui seront déposées en janvier, en vue des élections des 24 et 25 février.
Dans une salle du Sénat et pas au siège du gouvernement, M. Monti - présenté par sa porte-parole comme étant "le sénateur Monti" - a souligné qu'il n'était "pas en train de créer un nouveau parti" mais "un rassemblement pour faire travailler ensemble" les différentes forces qui soutiennent déjà son programme intitulé "Changer l'Italie, réformer l'Europe".
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Au Sénat, les mouvements favorables à M. Monti devront former une "liste unique" dénommée "Agenda Monti pour l'Italie", a-t-il annoncé. A la Chambre des députés, il s'agira d'une "fédération" de plusieurs listes. Fidèle à sa réputation de sérieux, il a annoncé qu'il contrôlerait la composition des listes avec l'aide d'Enrico Bondi, un redresseur d'entreprises jouissant d'une image d'homme intègre. L'idée étant d'en exclure tout postulant ayant eu maille à partir avec la justice.
M. Monti a dit avoir reçu "un soutien ample et crédible" à son programme, au cours de la longue réunion de vendredi avec les ex-chrétiens démocrates de l'UDC, des formations centristes comme Futur et Liberté, le centre de réflexion Italia Futura du patron de Ferrari Luca di Montezemolo et d'autres "représentants de la société civile".
Le "Professeur" - son surnom en tant qu'ex-professeur d'économie - a souligné l'importance, à ses yeux, d'"intensifier le rythme les réformes lancées" pendant les 13 mois de mandat.
Il a qualifié sa stratégie d'"opération visant à renouveler en profondeur la politique italienne" avec l'objectif d'"avoir un jour une vocation majoritaire".
Selon Antonio Noto, de l'institut de sondage IPR Marketing, une coalition dirigée par M. Monti a un potentiel électoral pouvant monter à 24%, ce qui en ferait le deuxième parti italien derrière la formation de centre gauche Parti démocrate, créditée d'un peu plus de 30%.
La "montée en politique" de M. Monti, pour reprendre l'expression qu'il a lui-même choisie, a déjà provoqué de profonds bouleversements sur l'échiquier italien.
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Silvio Berlusconi qui avait annoncé à grand fracas sa sixième candidature pour le poste de Premier ministre début décembre, n'a cessé ces derniers jours d'attaquer les mesures de rigueur et les hausses d'impôts décidées par M. Monti que le Cavaliere a accusé d'être "accroupi" devant l'Union européenne. La campagne de M. Berlusconi décrite comme "populiste" le cantonne à 15/16% des intentions de vote.
M. Monti n'a pas caché vouloir séduire aussi la frange la plus centriste de la gauche italienne.
"L'axe traditionnel droite-gauche a une valeur historique, symbolique et substantielle sur les questions de redistribution des ressources" mais "le vrai axe qui sert à l'Italie c'est celui qui mise sur l'Europe et les réformes nécessaires", a-t-il dit.
Le chef du PD Pier Luigi Bersani lui a répondu vendredi en évoquant un rapport "d'estime et de respect" mais il lui a demandé de préciser "s'il est prêt à une alliance avec le PD qui sera le premier parti italien ou s'il se pose en adversaire".
Pour le secrétaire du PDL, le parti de Silvio Berlusconi, Angelino Alfano, les jeux sont en réalité déjà faits : "la conférence de presse du sénateur Monti révèle sans équivoque la tentative de dissimuler, derrière une candidature modérée, un projet d'alliance avec la gauche".