Quelques centaines de personnes se sont rassemblées vendredi à Malonne (sud de la Belgique) pour protester contre l'éventuelle arrivée dans le village de Michelle Martin, l'ex-femme du meurtrier pédophile Marc Dutroux.
Des gens portaient des ballons blancs, en hommage aux enfants victimes du couple, ou noirs, pour protester contre la décision de libération anticipée prise mardi par le Tribunal d'application des peines (TAP) de Mons.
"Cette libération, ça nous touche beaucoup. Il faut se mettre à la place des parents et penser au calvaire que les fillettes ont subi", explique Albert Ponassi, un sexagénaire proche de la famille d'une des victimes.
Le cortège s'est approché du monastère des soeurs clarisses qui doit accueillir l'ex-épouse de Dutroux.
Arrivé à proximité du couvent, situé sur les hauteurs du village, des sifflets et des cris ont fusé: "Honteux, honteux! En prison, en prison!" "Honte à qui? A la justice!". Puis c'est le traditionnel lâcher des ballons, sous les applaudissements.
Quelques manifestants se sont attardés plus d'une heure en contrebas du monastère, dont le portail est barré d'un grand "Non" tagué cette semaine par des inconnus.
Michelle Martin, une ancienne institutrice âgée aujourd'hui de 52 ans, avait été reconnue coupable d'avoir séquestré plusieurs des jeunes victimes de Marc Dutroux et d'avoir laissé mourir de faim Julie Lejeune et Melissa Russo, âgées de huit ans, emmurées dans un cachot. Dutroux a été condamné à la perpétuité.
Dès mardi, le parquet général de Mons avait introduit un pourvoi en cassation contre la décision de remise en liberté. La plus haute juridiction du pays doit se prononcer avant la fin du mois, mais uniquement sur des questions de procédure. En attendant, l'ex-femme de Dutroux reste derrière les barreaux.
La décision du TAP, dénoncée par les familles des victimes, a relancé le débat sur le fonctionnement de ces tribunaux créés justement après l'affaire Dutroux.
"La pire des choses"
Des magistrats et des responsables politiques ont demandé que les décisions de remise en liberté puissent faire l'objet d'un appel sur le fond, et que les victimes soient consultées durant la procédure, ce qui n'est pas le cas jusqu'à présent. Plusieurs partis ont réclamé l'instauration de peines incompressibles pour les crimes les plus graves.
Incarcérée depuis son arrestation en 1996, Michelle Martin a purgé 16 ans de prison, soit un peu plus de la moitié des 30 ans de réclusion auxquels elle a été condamnée.
"Cela fait huit ans par enfant, juste l'âge de Julie et Melissa", relevait avec amertume dans le cortège une habitante de Malonne.
Si Michelle Martin devrait mener une vie "discrète" au sein du monastère, selon son avocat, rien ne l'empêchera légalement d'en sortir, une perspective redoutée par les habitants du petit village, qui compte plusieurs écoles et crèches.
"Si elle rencontre à nouveau un pervers comme Dutroux, elle est capable de recommencer", assure une retraitée venue en voisine, Jacqueline Nef.
"Elle avait mille et une occasions de sortir les filles" de la cave, "mais elle ne l'a pas fait, et maintenant c'est elle qu'on libère", dénonce-t-elle.
Patrick Vanhoven, venu de Bruxelles avec sa fille de cinq ans, avait pris part à l'immense "marche blanche" qui avait rassemblé plus de 400.000 personnes dans la capitale belge en 1996 pour dénoncer les crimes de Dutroux. Pour cet homme de 52 ans, "toucher à un enfant, c'est la pire des choses".
Comme d'autres, il assure qu'il participera aux autres manifestations annoncées dans les prochains jours.