Les amis d'enfance du tueur de masse Anders Behring Breivik ont décrit mardi un individu intelligent, tolérant et sociable mais aussi très soucieux de son apparence, subissant une opération pour se donner un nez "plus aryen" et utilisant régulièrement du maquillage.
Au 26e jour du procès de l'extrémiste de droite jugé pour la mort de 77 personnes, quatre anciens proches de Breivik ont expliqué comment "Anders", comme ils l'appellent encore, avait rompu les ponts en 2006, devenant de plus en plus obnubilé par la politique notamment d'immigration.
C'est à cette date apparemment cruciale que l'accusé, alors dans sa 27e année, retourne vivre chez sa mère et qu'il se consacre aux jeux vidéo pendant des journées entières.
Ses camarades, qui l'avaient jusqu'alors connu comme très sociable, enjoué et d'un abord facile, peinent à comprendre ce tournant.
"J'ai pensé qu'il était entré dans une grave dépression ou qu'il était devenu homosexuel et qu'il ne voulait pas faire son coming out", a déclaré un juriste qui le connaît depuis le lycée.
Pour appuyer ses dires, le témoin a expliqué que son camarade était extrêmement soucieux de son apparence, utilisait des poudres cosmétiques, n'avait pas beaucoup de petites amies et avait un "comportement féminin".
"Il se présentait comme métrosexuel comme David Beckham", a ajouté cet homme qui a un temps vécu en colocation avec l'accusé.
Aucun des anciens amis de Breivik n'a souhaité qu'il assiste à leur déposition ni que leur identité soit divulguée.
Après avoir entendu ses ex-amis depuis une pièce voisine, Breivik a fait une mise au point en fin de séance.
"Je n'ai jamais jamais été déprimé de toute ma vie", a-t-il souligné. "Je n'ai jamais été efféminé non plus", a-t-il ajouté, expliquant le recours au maquillage pour cacher ses boutons avant des sorties en ville.
Un autre témoin, ancienne petite amie d'un proche de Breivik, a quant à elle expliqué avoir pensé qu'en 2006, l'accusé était devenu complètement "accro aux jeux".
Après avoir lancé plusieurs start-ups souvent mort-nées à la suite de l'interruption prématurée de sa scolarité, Breivik s'est accordé une année sabbatique pour pouvoir jouer à World of Warcraft.
Il affirme aujourd'hui qu'outre un hobby, les jeux vidéo étaient "une couverture" pour pouvoir se concentrer sur la rédaction du manifeste idéologique de 1.500 pages qu'il a diffusé sur internet juste avant de perpétrer ses attaques le 22 juillet 2011.
Ce jour-là, il a tué 77 personnes en ouvrant le feu sur des jeunes travaillistes réunis en camp d'été sur l'île d'Utoeya juste après avoir fait exploser une bombe près du siège du gouvernement à Oslo.
Mardi, les témoins ont aussi évoqué l'opération du nez que Breivik a subie en 1999 quand il avait 20 ans.
Le meilleur ami d'enfance a expliqué qu'il voulait un "nez plus aryen", un autre explique que Breivik en avait assez d'être moqué pour son "nez d'arabe".
Mais personne dans son entourage n'y voit alors un message politique, estimant y voir un simple signe de vanité.
"Je n'ai jamais utilisé le mot +aryen+ de toute ma vie car c'est une expression issue d'une idéologie que je ne soutiens pas: le national-socialisme", a pour sa part affirmé Breivik.
L'opération a été réalisée par souci d'esthétique mais aussi parce qu'il avait eu le nez fracturé lors d'une agression par un Pakistanais, selon lui.
Aucun des amis de Breivik censés avoir assisté à cette agression n'a dit se souvenir d'un tel épisode mardi, ni d'ailleurs des deux autres rixes avec des musulmans dans lesquelles l'accusé assure avoir été impliqué dans sa jeunesse.
"Il était plutôt tolérant et ne cherchait jamais les embrouilles", a affirmé à la barre le meilleur ami d'enfance.
Selon ses proches, Breivik --jusqu'alors si retranché qu'il les avait éconduits un jour où ils s'étaient présentés à sa porte pour son anniversaire-- a repris contact début 2011.
Plusieurs ont confié avoir retrouvé un peu du "bon vieil Anders". Il faisait beaucoup de sports "pour avoir la forme avant l'été", a dit l'un d'eux.
Le groupe d'amis a notamment dîné ensemble fin avril, moins de trois mois avant les attaques. "Je n'ai rien remarqué de spécial", a affirmé le meilleur ami d'enfance.