Le Timor oriental se choisissait lundi un nouveau président, qui aura pour lourde tâche de prouver que ce confetti d'Asie du Sud-Est meurtri par des décennies de conflits peut assurer son avenir après le prochain retrait des Casques bleus.
Des files d'attente se sont formées dès avant l'ouverture des bureaux de vote, à 07h00 heure locale (22h00 GMT dimanche), pour ce second tour de l'élection présidentielle qui doit déterminer qui remplacera le président sortant, le prix Nobel de la paix José Ramos-Horta, éliminé au premier tour.
Arrivé en tête de ce scrutin du 17 mars, avec près de 29%, Francisco Guterres "Lu Olo" est opposé au général Taur Matan Ruak, ancien chef des forces armées, qui avait obtenu un peu moins de 26%.
La fonction présidentielle est largement honorifique, la couleur du gouvernement dépendant des législatives qui auront lieu le 7 juillet. Mais le chef d'Etat bénéficie d'un prestige jugé essentiel pour assurer une paix durable, à un moment où les Casques bleus préparent leur retrait prévu fin 2012, après 13 ans de présence dans la toute jeune démocratie, indépendante depuis 2002 seulement.
Sonnant comme un rappel de la fragilité de la situation, une centaine de personnes ont attaqué vendredi à coups de pierres les bureaux de Taur Matan Ruak à Dili, sans faire de victimes.
"Lu Olo", 57 ans, compte sur l'aura dont bénéficie son parti, le Fretilin. La formation de gauche, première force d'opposition, a été à la tête du combat contre les troupes indonésiennes qui avaient envahi le Timor après le départ de la puissance coloniale portugaise en 1975.
Alors jeune instituteur de 21 ans, Lu Olo avait cette année-là fui dans la jungle pour rejoindre la résistance : il y restera pendant les 24 ans de l'occupation indonésienne, qui ne s'est achevée qu'en 1999, après la mort de plus du quart de la population.
"J'ai confiance de l'emporter", a déclaré le candidat en votant dans la capitale Dili. "Je serai le président de tous pour assurer la paix et la stabilité", a-t-il promis.
Lu Olo trouve face à lui Taur Matan Ruak, lui aussi ancien guérillero. Tandis que Lu Olo a réussi sa reconversion civile, devenant président du Parlement de 2002 à 2007 avant de décrocher un diplôme de droit, le général Ruak n'a lui jamais quitté l'uniforme.
Taur Matan Ruak, un nom de guerre qui signifie "yeux perçants", avait commandé les Forces de défense du Timor oriental (Falintil), le bras armé du Fretilin, avant de diriger les forces armées jusqu'en 2011. Et c'est en treillis militaire que le général de 55 ans a fait campagne, promettant d'instaurer le service militaire.
Les Nations unies avaient recommandé son inculpation pour trafic d'armes après les violences de 2006, où le Timor avait été au bord de la guerre civile.
Soutenu par le CNRT, la formation de centre-gauche de l'actuel Premier ministre Xanana Gusmao, "TMR", comme on le surnomme, pourrait pâtir des scandales de corruption qui ont récemment éclaboussé le gouvernement.
Lors d'un récent meeting de campagne à Dili, le candidat avait promis de "préparer l'avenir" des enfants du Timor.
La moitié des 1,1 million de Timorais vit sous le seuil de pauvreté. La découverte d'un gisement d'hydrocarbures prometteur a fait naître l'espoir d'un développement mais les revenus de l'or noir et du gaz couvrent aujourd'hui 90% des dépenses de l'Etat. Le Timor est "l'économie au monde la plus dépendante des hydrocabures", a récemment souligné le Fonds monétaire international.
Les bureaux de vote doivent fermer à 15h00 (06h00 GMT). Des résultats préliminaires devraient être donnés d'ici à mardi.