Selon plusieurs études, nous ne réagissons pas de la même manière à des problèmes moraux lorsqu'ils nous sont exposés dans notre langue maternelle ou dans une langue étrangère.
Les résultats de plusieurs études révélées par le site Scientific American démontrent que si l'on vous pose une question du type : «seriez-vous prêt à sacrifier une personne pour en sauver cinq ?» dans votre langue maternelle ou dans une langue étrangère, apprise à l'école par exemple, votre réponse ne sera pas nécessairement la même.
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Lors d'une de ces enquêtes, les psychologues ont soumis à leurs patients le dilemme du train. Il s'agit d'un problème moral qui se présente comme ceci : vous êtes à proximité d'un rail sur lequel roule un train. Sur ce rail, quelques mètres plus loin, cinq personnes sont attachées. Vous vous trouvez juste à côté de la manette permettant de dévier le train sur un autre rail. Problème : une personne est attachée sur cet autre rail. Actionnez-vous la manette quand-même ?
Ne rien faire ou sacrifier une seule personne ?
Le dilemme moral vient du choix qui est laissé à la personne : soit ne rien faire et laisser plusieurs personnes mourir, soit intervenir et être ainsi la cause de la mort d'une seule personne. Les études ont montré que seulement 20 % des sujets interrogés dans leur langue maternelle sont prêts à sacrifier une personne pour en sauver cinq autres, tandis que cette part monte à 50 % chez ceux interrogés dans une langue étrangère.
Et le type de langue natale des participants ne jouait absolument aucun rôle. Les locuteurs dont la langue d’origine était l’anglais, et à qui on avait demandé de s’exprimer en espagnol, ont offert des réponses similaires à ceux dont la langue d’origine était l’espagnol, et qui s’exprimaient en anglais.
La morale fait appel aux sentiments
Dans une autre étude, des volontaires doivent lire des descriptions d’actes qui ne font a priori de mal à personne, mais que le sens commun réprouve, détaille "Slate". Comme le récit d’un frère et d’une sœur majeurs qui ont des relations sexuelles. Ou celui d’un homme qui, après que son chien soit mort renversé par une voiture, le cuisine et le mange. Ces volontaires les lisent tantôt dans leur langue d’origine, tantôt dans une langue étrangère.
Les chercheurs estiment notamment que dans notre langue maternelle, la morale fait beaucoup plus appel aux sentiments, à ce qui touche au viscéral, tandis que dans le cas d'une langue acquise, notre moralité a bien plus recours à notre jugement, relève "Les Echos".
Les souvenirs influent sur la morale
Selon les psychologues, la mémoire pourrait également jouer un rôle important dans le lien entre la langue maternelle et une morale plus émotive. En effet l'apprentissage du sens moral, rappelle l'article de Scientific American, se fait dès le plus jeune âge, avec l'expérimentation d'émotions fortes comme l'abondance d'amour, la rage, l'émerveillement ou encore la punition.
La morale de l'adulte vibrerait alors en résonnance avec les souvenirs de ces émotions exprimées et vécues dans la langue maternelle, des émotions viscérales, qui n’apparaîtraient pas dans une langue apprise au cours de notre vie.