A 13h précises ce jeudi, au restaurant Drouant à Paris, sera annoncé le nom du lauréat du Goncourt, le plus convoité des prix littéraires du monde francophone, pour lequel sont en lice quatre auteurs dont deux femmes et un primo-romancier.
Les thèmes des quatre oeuvres en lice pour le Goncourt appartiennent à un registre sombre: infanticide pour Leïla Slimani, suicide pour Catherine Cusset, cannibalisme pour Régis Jauffret et génocide pour Gaël Faye.
Dans la foulée du Goncourt, le jury Renaudot, réuni également au Drouant, attribuera son prix concluant ainsi la saison des grands prix littéraires d'automne. Le Renaudot compte cinq finalistes : Adélaïde de Clermont-Tonnerre qui vient de décrocher le Grand Prix du roman de l'Académie française, Régis Jauffret, Simon Liberati, Yasmina Reza et Leïla Slimani.
Les deux prix ont donc en commun deux auteurs, Leïla Slimani et Régis Jauffret, mais le jury Goncourt a la priorité du choix et il n'y aura pas de doublon.
Leïla Slimani pour succéder à Mathias Enard ?
Au jeu des pronostics, forcément hasardeux, c'est la jeune romancière franco-marocaine Leïla Slimani qui semblait être la favorite pour succéder à Mathias Enard.
Son roman "Chanson douce" (Gallimard), histoire atroce et extrêmement bien construite, raconte l'assassinat de deux jeunes enfants par leur nourrice. C'est d'ores et déjà un succès de librairie. Deuxième roman seulement de l'écrivaine, née au Maroc il y 35 ans, il se dévore comme un thriller mais peut aussi se lire comme un livre implacable sur les rapports de domination et la misère sociale.
Mais les dix membres du jury présidé par Bernard Pivot aiment déjouer tous les paris. Peu de femmes figurent au palmarès du Goncourt. Au cours de ces 20 dernières années, le prix n'a récompensé que quatre lauréates.
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Si Slimani manque le coche, quelles sont les chances des uns et des autres ?
"L'autre qu'on adorait" de Catherine Cusset se présente comme un hommage à son ami Thomas Bulot qui s'est suicidé un jour d'avril 2008 à 39 ans. Le livre, qui n'est pas une fiction, a divisé la critique mais la romancière, âgée de 53 ans et qui dans le passé a remporté le Goncourt des lycéens, a derrière elle une oeuvre importante qui pourrait séduire le jury Goncourt.
Régis Jauffret qui à 61 ans est l'aîné de la bande fait figure d'outsider et compte lui aussi une oeuvre imposante. Il a déjà été lauréat du Fémina. "Cannibales" (Seuil) est un livre "à s'en lécher les babines", a estimé Bernard Pivot dans une de ses chroniques littéraires du JDD. Porté par une écriture très XVIIIe siècle, peut-être sa grande force et sa plus grande faiblesse, "Cannibales", recueil de correspondance entre deux femmes machiavéliques discutant sur le meilleur moyen d'en finir avec un homme est délicieusement amoral.
Un primo-romancier récompensé ?
Le dernier larron est le primo-romancier Gaël Faye, 34 ans, figure montante de la scène rap française et incontestable révélation de la rentrée littéraire. Son livre "Petit pays" (Grasset), sur son enfance au Burundi, a déjà été récompensé par le prix du roman Fnac. Par rapport à ses rivaux, son récit est celui qui se vend le mieux.
L'académie Goncourt osera-t-elle récompenser un primo-romancier ? Pourquoi pas même si c'est rare ! En 2011, le primo-romancier Alexis Jenni avait ainsi reçu le prix pour "L'art français de la guerre" (Gallimard).
La seule certitude est que "Galligrasseuil" (mot-valise pour désigner les maisons d'édition Gallimard, Grasset et Seuil) remportera la mise. Les quatre finalistes sont édités dans une de ces trois maisons. Gallimard n'a pas remporté le prix depuis 2011 et Grasset est absent du palmarès depuis 2005. Le Seuil a remporté le Goncourt pour la dernière fois en 2014.
Minuit et L'Olivier qui pouvaient légitimement espérer le prix cette année avec respectivement Laurent Mauvignier ("Continuer") et Jean-Paul Dubois ("La succession") ont vu leur poulain impitoyablement éliminé des sélections.
Le Goncourt demeure une aubaine pour les éditeurs. En moyenne un livre primé s'écoule à plus de 345.000 exemplaires.